dimanche 21 juin 2009

La similitude, n'est pas forcément où certains le croient !


Après avoir eu un rapide aperçu de l’attitude d’une frange animalitaire de l’église catholique romaine, au travers un article publié sur ces colonnes sous le titre « Pourfendez les tous, Dieu reconnaîtra les siens », il paraissait intéressant de faire partager d’autres observations sur le même sujet, ceci toujours dans l’esprit qui anime ce blog depuis sa mise en ligne.

Comme les anti-taurins voient des aficionados un peu partout dans la société française, surtout dans le milieu politique, les contempteurs de la franc-maçonnerie affirment que les francs-maçons eux aussi sont partout. Cette multiplicité serait le fait de ramifications du mouvement maçonnique, permettant à ce dernier d’œuvrer pleinement avec une omniprésence tyrannique. Ce soupçon d’influence s’est renforcé lors de ces dernières années, avec la multiplication de jeunes filles voilées au sein de l’école de la République, et l’actualité de cette semaine à propos de la burka risque de raviver la flamme. La laïcité chancelante, le législateur dût exprimer l’attachement à la loi de séparation des Eglises et de l’Etat, par une loi complémentaire au mois de mars 2004. Les francs-maçons furent accusés d’être derrière la loi qui interdit le port des signes religieux à l’école laïque et républicaine, mais aussi oubliant de préciser que le « foulard » n’était pas le seul visé contrairement à la fausse idée répandue (tout militant à ce moment là le savait très bien). Pourtant, en 2005, lorsque fût célébré le centenaire de la loi de séparation des églises et de l’Etat, « La libre pensée », « l’Union Rationaliste » et d’autres mouvements possédant des valeurs réellement laïques étaient aussi en premières lignes. Mais si il a été reproché aux francs-maçons un laïcisme radical, c’est qu’ils ont posé sur le bureau du Président de l’Assemblée Nationale d’alors, douze propositions de lois intitulées Chantiers de la laïcité, ce qui a fortement agacé.

Il est alors intéressant pour nous aficionados a los toros, de nous rendre compte que parmi ceux qui désiraient laisser ainsi porter atteinte à l’un des piliers de la République dans les écoles républicaines, il n’y eut pas que les seuls mouvements religieux favorables à cette libre circulation. Ce sont joints à eux, sans trop oser s’afficher à leurs côtés malgré que les manifestations allèrent vers la même orientation politique, des mouvements d’extrême gauche associés à des libertaires, altermondialistes, écologistes. Tout un monde associatif et idéologique, qui au delà de cette alliance contre nature, se retrouve là aussi chez les anti-taurins.

Pour se rendre compte de cette promiscuité entre quelques mouvements idéologiques et la taurophobie, il n’y a cas lire un dossier disponible sur le net au moment où sont écrites ces lignes, un cours d’anti-tauromachie*, écrit semble-t-il en 2003, sur lequel ne figure que la mention « CROA ». A essayer d’en savoir un peu plus, ce « cours » semble émaner d’un militant progressiste et amoureux de la nature, qui reprend dans sa construction, la forme de bon nombre de documents propagandistes en droite ligne avec ceux déjà utilisés contre la franc-maçonnerie.
L’auteur n’hésite pas à fournir des affirmations faites avec un certain aplomb, mais aussi s’efforce de faire croire à ses lecteurs que la tauromachie à des collusions avec les fascismes européens. Tout comme les auteurs d’ouvrages consacrés à dénigrer la franc-maçonnerie, qui s’enorgueillissent de présenter des aspects sataniques de celle-ci par des photographies représentants des intérieurs de temples ou autres symboles aux explications détournées d’après les spécialistes. Ce « cours d’anti-tauromachie » illustré par le cliché publié en introduction au présent texte, tire par cette image des conclusions fermes et définitives. Pour l’auteur de ce pseudo cours, la photographie illustre aussi dans la partie Histoire la collusion du mundillo et des latifundistes avec la Phalange et les autres fascismes d’Europe. Il développe par la suite un prétendu prosélytisme aficionado. Lui-même en tenant de tels propos, ne semble pas se considérer comme pratiquant ce zèle ardant à tenter d’imposer ses idées.
Les aficionados pourraient aisément retourner la critique envers les anti-taurins, car les protecteurs animaliers n’échappent pas aux propos douteux sur les races, comme ce fût le cas à Nantes en 1936 lorsque la municipalité de l’époque voulue organiser des corridas. Des lettres des différentes SPA du pays arrivèrent au premier magistrat de la ville, dont une mentionnant que ces jeux du cirque, introduits en France par les espagnols et qui sont loin de correspondre au caractère de notre race. Pour la petite histoire, la municipalité nantaise de l’époque fût assez courageuse et ne fît pas cas des protestations, elle organisa les courses de 1936, pour la quatrième et ultime fois dans la cité des Ducs. Plus proche de nous, au mois de février 2008, il pouvait être lu dans un article d’un site internet d’un mouvement anti-corrida les propos concernant le responsable d’un site taurin qui n'est ni espagnol ni français d'origine.
La propagande de ce document ne s’arrête pas en si bon chemin, il est une fois de plus fait allusion au pouvoir de l’argent et des médias. Dans le « cours », l’auteur parle d’accointances de la presse avec le monde taurin, allant jusqu’à interroger le lecteur sur ce que peut rapporter au présentateur Michel Cardoze, ce clown de service météo comme il est écrit, de mentionner le temps qu’il fera pour la corrida vicoise du lendemain. L’auteur oublie de préciser que Michel Cardoze est certes aficionado, mais avant tout un enfant, même adoptif, du Gers. Le développement, la construction de l’argumentation de ce « cours d’anti-tauromachie », est parfaitement dans la lignée des divers textes anti-maçonniques, à l’identique de ceux de Léo Taxil, qui fût anticlérical et franc-maçon avant de devenir le chef de file le plus connu de l’anti-maçonnisme.

Plus récemment, l’on a constaté que les contempteurs taurins sont montés d’un cran sur l’échelle de la haine envers les aficionados, et les propos sont une nouvelle fois issus de cette mouvance politique paraît-il respectueuse des différences. Dans la rubrique « Clarines » de son numéro 1852 du 9 mai 2009, la revue « Toros » rapporte que le « journal » Charlie Hebdo du 8 avril précédent, a écrit dans ces pages à propos de Montherlant et de Picasso, qu’ils étaient sans doute des artistes haut de gamme, mais des humains bas de gammes. Pourquoi ces propos ? Simplement parce qu’ils aimaient la tauromachie. La théorie du sous homme chère à une certaine idéologie, n’est pas très éloignée comme le précise la doyenne des revues taurines.

Issus encore de cette même mouvance à l’apparence progressiste, humaniste et soucieuse du respect des différences, l’on peut ajouter celles de ceux qui pensent être les cautions intellectuelles et morales. Des « célébrités » médiatiques, artistes, humoristes, animateurs de télévisions, hommes et femmes syndicalistes et politiques, philosophes, … Ces cautions « intellectuelles » dénoncent elles aussi l’art de Cuchares d’une façon intolérante en voulant imposer leur seule vision du monde, s’en prennent aux aficionados comme d’autres s’en prennent directement à l’ensemble des francs-maçons.
Il est toutefois curieux de les savoir silencieuses devant les dénonciations de telle personne portant un intérêt à la tauromachie, et de la marquer ainsi aux yeux de l’opinion sans le consentement de la personne visée, alors que son intérêt taurin ne relève que de la sphère privée tout comme d’éventuelles appartenances religieuses ou conceptions philosophiques. Ces mêmes personnes taurophobes, s’indignent souvent devant la prolifération des caméras de surveillances dans les rues, ou bien manifestent contre un monde qui créés des sources de renseignements dès qu’il le peut sur les citoyens, mais elles n’hésitent pas à jeter en pâture à qui veut le lire ou l’entendre des noms de personnes donc les actions et attitudes ne relèvent que de la vie privée, ceci afin de les ficher en leur apposant l’étiquette « aime la corrida ».
Il n’est pas rare non plus de trouver ce genre de comportement chez les adversaires des francs-maçons, qui militent jusqu’à demander que soit connue l’appartenance des personnes à la franc-maçonnerie, afin qu’elles soient fichées comme telles. Il y a quelques années, l’Italie a interdit à ses magistrats d’être francs-maçons. Il n’y a pas si longtemps, au Royaume-Unis, l’un des berceaux du militantisme animalier radical, des groupes de pressions ont tenté auprès du gouvernement d’imposer que les fonctionnaires anglais francs-maçons soient connus et répertoriés. En France ce type de désir existe aussi, mais l’esprit démocratique conjoint à la séparation des sphères publiques et privées résiste encore un peu devant ce type de demandes.

Il est regrettable de voir silencieux ces intellectuels forts brillants, et ainsi de les savoir cautionner ces attitudes. Malgré leurs esprits d’analyses, ils se laissent emporter dans le tourbillon des anti-taurins radicaux, ne dénonçant pas les mensonges et inepties. Car l’on peut ne pas aimer la tauromachie, et toutefois dénoncer les abus et mensonges de ceux qui ont les mêmes idées, une telle démarche serait en droite ligne de ce qui est communément nommé « l’honnêteté intellectuelle ».

Il est dommage encore de constater qu’ils n’ont pas condamné l’annonce d’un procès prévu le 24 novembre 2003 à « l’Université Libre de Bruxelles Institut de Sociologie ». Un procès de la « Cour Internationale de Justice des Droits de l’Animal » contre l’Union Européenne ainsi que les gouvernements et les ministres responsables des pays impliqués dans les corridas. Cette cour internationale présidée par un écologiste suisse, qui écrit lors d’un texte rendant hommage à la poétesse et romancière Simone Chevallier en préface de la réédition de « Celle qui aima Jésus », nous avions le même credo : rester entier, célébrer le Créateur au travers de toutes ses créatures.

Les dénonciations qui malheureusement n’ont pas été faites de la part des intellectuels, auraient pu porter aussi bien sur le fond que sur la forme. Sur la forme, concernant cette parodie de procès, tronqué par le fait du parti pris du président de la « Cour Internationale de Justice des Droits de l’Animal », qui n’est effectivement aucunement impartial comme le réclamerait toute justice soucieuse d’équité, puisque favorable à l’abolition de la tauromachie. Outre cette présidence faussée, la composition du jury de ce pseudo tribunal est constituée de neuf personnes appartenant au milieu des la protection des animaux, ainsi que de trois juges. Cela ne semble pas être très démocratique, ni facteur de comportement digne de probité. Pourtant, les intellectuels anti-taurins soucieux de justice sociale, de respect des individus et donnants des leçons en ce sens, ont « oublié » de réfuter cette parodie de procès.
Sur le fond, les propos, que les brillants intellectuels ne dénoncent pas, comme par exemple que la corrida est un abattage rituel qui a lieu au sein d’une tribalité réinventée. Elle prospère grâce à des exceptions, dérogations et autres passes droits. Elle est orchestrée par une mafia internationale qui fonctionne comme une secte et qui profite de l’hystérie collective des réjouissances de bas étage faisant appel aux pulsions les plus sordides, notamment sou l’emprise de l’alcool . De telles accusations sont pourtant « surprenantes » de la part d’un mouvement qui insiste dans ses textes associatifs, sur le fait qu’il souhaite une information du public complète et objective concernant la corrida.

Une nouvelle fois apparaît la forme commune des accusations entre la franc-maçonnerie et la tauromachie. Accusations dénoncées par les « intellectuels » sur un plan, mais cautionnées par ces mêmes personnes lorsque cela les arrange. L’on constate avec tristesse, qu’ils ne s’émeuvent pas de trouver parmi les propos tenus dans leurs rangs, des similitudes argumentatives reprises aux adversaires des francs-maçons comme ce fût le cas aux heures les plus fortes de la répression envers ces derniers, répression que pourtant bien souvent ils dénoncent. Les similitudes, rapprochements idéologiques que certains veulent faire porter aux aficionados a los toros, ne sont sûrement pas de l’ordre que d’aucuns veulent faire croire.

http://croa33.club.fr/Not-pp.htm
http://www.flac-anticorrida.org/archives/cours-internationale-droits-animal.html

dimanche 14 juin 2009

Luis-Francisco Esplà


Un jour du mois de juin de l’An de grâce 2009, la grande porte des arènes de Las Ventas de Madrid s’est ouverte, pour laisser passer un Torero porté en triomphe. De la presse aux blogs taurins, quasiment tout le monde a salué son magistral et ultime combat sur le sable madrileño,

Luis-Francisco Esplà va bientôt se retirer des arènes, même si à en croire les hommages qui lui sont rendus suite à sa dernière prestation madrilène, l’on pourrait penser qu’il est déjà parti, comme si après Madrid plus rien ne devait exister. Tout au long des hommages, les mots employés ici ou là, laissent poindre le souvenir à jamais perdu, celui que l’on veut se remémorer car l’on sait qu’il ne sera plus jamais ressenti avec autant d’intensité. Mais aussi, le départ du maestro Esplà représente inconsciemment, une partie de nous même qui s’en va. Ce constat est d’autant plus amer, si l’on a la chance de l’avoir vu à plusieurs reprises.

Je fais parti des ces aficionados a los toros, qui ont eu le bonheur d’être initié très jeune aux mystères taurins, de cette génération qui a vu enfant les débuts d’Esplà. Enfant, certes, mais juste assez grand pour pouvoir garder présent à l’esprit une corrida vue en direct sur TVE, où étaient combattus des toros de Victorinos Martin, au mois de juin 1982, une corrida lors de laquelle Luis-Francisco partageait le cartel avec Francisco Ruiz-Miguel et José Luis Palomar, et qui fût qualifiée de corrida del siglo.

Esplà est non seulement un matador de toros, mais plus encore, un Torero devenu Un Initié aux mystères taurins mais aussi à ceux de la Vie. Il est de ces hommes, pour qui la passion se conjugue avec d’autres centres d’intérêts, qui permettent ainsi de garder le recul nécessaire pour vivre avec force et intensité, afin que justement cette passion ne soit pas trop étouffante voire intellectuellement obscurantiste.
Luis-Francisco a construit son toreo tout au long de plus de trente années d’alternative, au point de devenir lui-même un architecte de la lidia dans sa globalité. Un bâtisseur au même titre que d’autres architectes oeuvrant dans des domaines différents, ont fini par entrer au panthéon de l’Histoire, et parfois de voir se forger autour d’eux, une légende millénaire qui perdure de nos jours. Esplà va entrer dans la légende tauromachique, même si l’on rencontre encore quelques aficionados qui vont lui trouver des défauts (mais sont-ils eux-mêmes exemplaires ?), de ces aficionados qui en ce moment ne font qu’un avec les louanges ayant fusés ces premiers jours du mois de juin. Luis-Francisco va donc entrer dans la légende, pas de ces légendes préfabriquées qui remplissent les tendidos sur leurs seuls noms, alors qu’elles se « construisent » avec des toros qui n’ont pas grand chose de bravo, si ce n’est le qualificatif de brave dans le sens parfois employé dans mon midi natal. Non, Esplà est de la lignée de ces Toreros légendaires, qui à divers moment de leurs carrières, ont ouverts leurs portes intérieures afin de Connaître et de Se Connaître.

Pour cela, il touche à divers Arts, manuels, mais aussi intellectuels, de la peinture à son intérêt pour l’histoire. Je ne sais si il est initié dans un quelconque mouvement philosophique, et peu importe d’ailleurs, car cela ne fait pas la seule grandeur d’un homme. Le plus important est que, tel Hiram Abi qui fût l’architecte du temple du roi Salomon et dont la légende nous rapporte qu’il maîtrisait divers arts allant de la connaissance des métaux à celle de la pierre, auxquels il joignait la pratique de la pensée, le maestro Luis-Francisco Esplà est un torero entier et professionnel. Il peut s’enorgueillir d’être dans la droite filiation des ces architectes bâtisseurs, qui pratiquèrent leur art mais aussi l’art royal, c’est à dire la pensée qui permet de cheminer. Il est de ceux pour qui le Toro est un idéal de vie, un idéal qui ouvre à l’Autre et aux Autres, de part le travail intellectuel que nécessite la compréhension globale de cet animal et de l’art de le combattre.

Esplà est Un Initié aux mystères taurins, non pas parce qu’il est torero de profession, mais parce qu’il est Torero dans la vie. Il connaît ce que nous ne connaîtrons jamais, nous aficionados a los toros, il combat le toro, alors que nous, nous regardons. Il a appris le toro, la tauromachie dans son ensemble ainsi que ses mystères les plus subtils, il connaît les différents arts qui composent l’esprit taurin.

C’est peut être cela qui aiguise notre amertume à le voir partir. Nous avançons au sein de l’espace et du temps de notre passage sur la terre des hommes, et les simples mortels que nous sommes, voyons par sa retraite des ruedos, la notre qui se profile et tout ce qu’elle représente aux yeux de la société aseptisée qui se met en place un peu plus chaque jour renforcée dans sa version bio-bio. Cette retraite, la notre mais aussi celle du maestro Esplà, renvoie au constat que nous sommes tous en quête d’immortalité. Avoir des enfants en est une inconsciente, s’impliquer dans une passion ou bien un centre d’intérêt en est une autre, puisque beaucoup rêvent secrètement de marquer de son passage par son engagement, en est une autre plus consciente.

Le départ d’un maestro tel que lui, nous met face à une réalité, celle que pour parvenir à l’immortalité symbolique recherchée, le travail doit être bien plus grand que celui effectué jusqu’alors. A regarder maintenant l’ensemble de la carrière du maestro, et le savoir au porte de la légende et donc de l’immortalité, nous mesurons son travail accomplit et parallèlement celui qu’il nous reste à accomplir, et qui ne sera probablement qu’un rêve, un fantasme, jamais réalisé.

Toutefois, pour que le maestro Luis-Francisco Esplà reste tout en haut de la légende tauromachique, il ne faudra pas que les générations montantes, qui à tout juste vingt ans ont des avis sur tout et surtout des avis, galvaudent la réalité qui fût celle de sa carrière. Les filtres des années, les confusions de la mémoire au fils du temps, offrent le risque d’une telle dérive. Si nous, aficionados a los toros pleinement acteurs de notre génération, transmettons le seul souvenir du torero en enluminant la carte postale afin qu’elle jaunisse le plus tard possible, non seulement nous ne serons pas fidèle à la réalité, mais nous n’honorerons pas l’esprit qu’a tenté d’insuffler le maestro tout au long de sa carrière.

Espiègle, malicieux, il peut aussi être reproché à Luis-Francisco Esplà d’avoir fait le minimum devant quelques toros combattus, il n'est pas parfait comme nous tous. Mais il restera de ces Toreros qui à plus de 50 ans, sont encore à l’affiche d’arènes telles que Vic cette année, ou bien de Céret l’an passé, alors que d’autres beaucoup plus jeunes, baissent sûrement les yeux lorsque ces empresas demandent qui veut venir affronter les élevages retenus dans ces ruedos.

De sa prestation madrilène du moi de juin 1982, à celle toujours madrilène de ce mois de juin 2009, Luis-Francisco Esplà a montré toutes les facettes du toreo, des toreros et par cela des hommes. Pour peu que l'on veuille bien voir en lui autre chose qu'un homme qui combat les toros, de par sa conception de la tauromachie et à travers elle de la vie, il nous a renvoyé à nous-même, à notre complexité intérieure, mais aussi face à nos réalités. C’est en cela que je garderai le souvenir de ce grand Torero, car ma retraite est encore loin, je dois encore cheminer, et la carrière de ce torero n’est pas dénuée d’intérêt taurins et humanistes. Gracias Maestro !

mardi 9 juin 2009

Dictionnaire "Pertus", répertoire de textes taurins en langue française.


L’Union des Bibliophiles Taurins de France (UBTF), vient de publier ces jours-ci, le « Dictionnaire Pertus, répertoire des textes taurins en langue française ». Cet ouvrage de 525 pages, est la poursuite du travail réalisé par Raymond Pertus, publié il y a plus de 20 ans par l’UBTF dont il était l’un des sociétaires.

Comme le précise dans la préface Marc Thorel, Président de l’UBTF, Raymond Pertus a réalisé une œuvre à laquelle bien d’autres avant lui voulaient s’atteler, ont parfois débuté, mais n’ont pas réussi pour diverses raisons, à totalement mener à bien. Mais notre homme l’a fait, au point que son dictionnaire, est maintenant dénommé « Le Pertus », et qu’on le retrouve en guise de référence auprès de commissaires-priseurs, libraires anciens, universitaires et chercheurs, mais aussi chez les bibliophiles taurins ou non.

Serge Milhé, Bernard Rendu et Jean-Louis Rouyre, les auteurs de cette nouvelle édition, ont donc continué la tâche, prenant soin de suivre une ligne directrice. Ils ont gardé l’esprit de Raymond Pertus, tenu compte des observations formulées lors de la précédente édition, supprimé quelques titres qui semblaient hors sujet, ne gardant pas les ouvrages qui ne mentionnent que peu de lignes taurines. Par contre, l’évocation d’une corrida, un livre même anti-taurin, possèdent leurs places dans ce dictionnaire. Pour référencer les textes plus ou moins teintés de tauromachie, le choix fût, comme tous les choix qui doivent être réalisés, subjectifs malgré les nombreuses questions qui se sont posées aux trois sociétaires de l’UBTF attelés à ce travail remarquable.

Ce dictionnaire ne recense pas que les livres tauromachiques, même si les revues taurines ne trouvent pas place dans cet ouvrage, exception fût faite pour celles de luxe publiées en petites quantités, les numéros spéciaux portants sur un objet unique, mais aussi les magazines qui ont traité de la corrida lors d’un numéro spécial du moment ou celui-ci était jugé digne d’intérêt.
Les apport universitaires sont aussi de mise dans cette nouvelle édition du dictionnaire « Pertus », qu’ils soient de l’ordre du médical, vétérinaire, ethnologiques, littéraires ou encore sociologiques.
Les références de bandes dessinées qui traitent de la tauromachie, figurent dans cette édition, du moment ou la aussi elle furent jugées digne d’intérêt.

En qualité de membre de l’UBTF ayant assisté, et participé, au colloque de l’association du mois de novembre dernier, je fus de ceux qui ont entendu les auteurs exprimer la complexité de leur immense travail. Lorsque qu’en 4ème de couverture du dictionnaire, il est précisé que celui-ci n’est pas qu’une simple réimpression agrémentée de quelques mises à jours, mais que les notices ont été revues et discutées une par une, cela est bien réel.

Les auteurs ont poursuivi l’œuvre de Raymond Pertus, dont la collection personnelle fût dispersée après sa mort lors d’une vente aux enchères qui s’est déroulée au Mans début novembre 2005, tout en gardant l’esprit bibliophile qui les anime.
Ce dictionnaire qui pourra intéresser les professionnels, bibliothécaires, experts, commissaires-priseurs, s’adresse aussi aux chercheurs de la chose taurine, ainsi qu’aux aficionados a los toros. Même si parmi ces derniers certains ne sont pas trop bibliophiles, et peuvent s’interroger sur la nécessité de posséder un tel dictionnaire, il faut toutefois qu’ils aient conscience que ce livre est rare. Une rareté du fait que 20 ans séparent les deux éditions, et il n’est pas prévu à ma connaissance, contrairement à d’autres dictionnaires généralistes, de publication annuelle. Ensuite, l’édition 2009 s’est vue tirée à 160 exemplaires numérotés pour les membres de l’association, auxquels s’ajoutent seulement 335 exemplaires pour la vente au public. Ce qui laisse présager que ce dictionnaire va rapidement devenir une pièce recherchée dans la bibliophilie taurine. Mais aussi et surtout, ce dictionnaire « Pertus », leur apportera source de références dignes d’intérêts pour continuer le cheminement dans l’art taurin.


« Dictionnaire Pertus, répertoire des textes taurins en langue française », de Serge Milhé, Bernard Rendu et Jean-Louis Rouyre. Préface de Marc Thorel.
Editions Union des Bibliophiles Taurins de France, juin 2009.
ISBN 978-2-909521-31-2.
525 pages, format 21 x 12, papier Terraprint mat 70g.

Renseignements à l’adresse courriel ubtfdiffusion@orange.fr

Prix 28 euros, plus 4 euros de frais de port.

Commande possible à l’adresse :

U.B.T.F. Diffusion
4 Plan de Thau
34540 Balaruc les Bains
France

jeudi 4 juin 2009

Pourfendez les tous, Dieu reconnaîtra les siens.


Lors d’une soirée chez des amis, des autochtones de cette région où je suis exilé, m’ont parlé de tauromachie. Après leur avoir dit et raconté avec précision que leur belle ville connue des corridas par le passé, ce qui en surpris plus d’un, une interlocutrice, se disant progressiste et ayant réellement réfléchi à une société humaniste, me dit qu’elle aimerait voir infliger au torero les mêmes « souffrances » que celles faites au taureau. Il est de coutume de se trouver face à un ou une adversaire de la tauromachie, chacun à le droit d’aimer ou bien de ne pas aimer la corrida de toros. Il est aussi malheureusement fréquent de parler à des taurophobes qui ne veulent pas voir mourir l’animal, mais demande la souffrance voire la mort de l’homme qui combat le taureau. Depuis les quelques décennies où je suis exilé loin des terres taurines, je ne suis plus surpris par ce genre d’attitude, même si elle n’est pas du seul apanage des habitants des régions septentrionales. Mais ce qui me surpris à l’issue de cet échange avec une personne se positionnant clairement contre la peine de mort, tout en étant désireuse de voir souffrir un homme simplement parce qu’il exerce une profession qu’elle n’aime pas, est que cette dame se prétendant tolérante et humaniste, ne chercha plus à m’adresser la parole de toute la soirée. Lorsque son regard croisait le mien, elle semblait fortement gêné. Il m’est alors apparu la phrase de Louis Panwels, vous êtes susceptibles d’être critiqués par trois sortes de gens : ceux qui font le contraire, ceux qui ne font rien, et ceux qui font la même chose.

Refuser la peine de mort et avoir une vision humaniste pour la société n’est pas du seul fait d’une certaine catégorie de personnes, beaucoup de gens possèdent ces idéaux. Se prétendre humaniste et refuser la peine de mort, tout en quelque sorte la souhaitant de manière détournée pour celui qui agit différemment, est un comportement assez fréquent. Mais l’instant de cette rencontre était associé à l’actualité du moment, à savoir la publication du livre de Christian Laborde « Corrida basta », pamphlet d’éructations haineuses dont parle très bien Ludo sur son blog*, et celui de Sophie Coignard « Un état dans l’Etat », un docuphlet (entre documentaire et le pamphlet) anti-maçonnique paru au même moment et dont nous a ressassé la presse ces derniers temps. Tout cela m’a ramené à quelques souvenirs. Ceux entendu lors de rencontres militantes, où les francs-maçons se faisaient critiquer par certains de mes camarades d’alors se disant eux aussi humanistes et progressistes, et dont les propos me faisaient songer à ceux taurophobes que nous aficionados avons l’habitude d’entendre.

Car force est de constater, que l’animosité développée vis à vis des mouvements initiatiques comme la franc-maçonnerie, est tout à fait comparable à celle que nous connaissons aficionados a los toros. La ténacité, la haine, la violence verbale dont les francs-maçons et des les aficionados sont les cibles, leur confèrent un lien réel au delà de la dramaturgie et de la symbolique qui peuvent les associer.
Lorsque le dialogue est établi avec des francs-maçons, il est percevable qu’une grande majorité d’entre eux et d’entre elles vivent leur idéal avec une forte probité. Il serait bon que les dérives d’une minorité ne soient pas prétextes à la généralisation afin de jeter systématiquement l’opprobre sur l’ensemble du mouvement, car il faut garder présent à l’esprit que tout ce qui a été contre cette philosophie, fût de l’ordre du dogme sociétal et religieux, du régime totalitaire. Les aficionados eux, n’ont pas à ce jour connus les meurtrissures physiques et morales qu’ont éprouvé les francs-maçons, sûrement au grand désespoir d’une frange extrémiste de leurs opposants les plus radicaux. La tauromachie n’a pas non plus connue de revers durant les années de la dictature espagnole ou sous le gouvernement de Vichy, laissant place à un honteux amalgame de la part des anti-taurins qui semblent oublier que le football non plus ne fût pas inquiété par le régime franquiste, et que même des footballeurs français ont joué en Espagne sous la dictature du Caudillo. Mais là, aucune accusation fasciste, et c’est heureux. Certes des éleveurs et des toreros ont profité d’une promiscuité douteuse entre l’Etat et une certaine partie du monde taurin espagnol de l’époque, mais cela doit-il ici aussi qualifier l’ensemble des acteurs du mundillo mais aussi les aficionados, d’appartenances aux idéologies développées par le régime ? Pour le lecteur qui a déjà visité ces colonnes, de précédents articles montrent que non.

Il est tout de même intéressant de constater que les francs-maçons et les aficionados trouvent parmi leurs adversaires quelques mouvements communs. Il n’est nul besoin de remonter très loin dans le temps pour le percevoir. L’histoire de l’anti-maçonnisme est riche, depuis la première bulle eminenti apostolatus specula qui date de 1738 et émane du Pape Clément XII, jusqu’à ces dernières semaines avec la protestations du responsable monégasque de l’église catholique devant la récente création d’une nouvelle obédience dans la principauté, faisant même référence à un texte promulguant l’incompatibilité d’appartenance à la franc-maçonnerie et l’église catholique, texte datant de 1983 et écrit alors par le Pape actuel.

Faire de même depuis la première intervention de l’église contre la tauromachie, ne relèverait que de la constatation historique. Là aussi, le passé récent, le quotidien, apportent aisément de quoi aborder ce sujet. Mais que les choses soient claires, il n’est pas question ici d’amalgamer les croyants et les décisions prises par des responsables de cette église. Je connais des croyants sincères et extrêmement laïques, plus que certains athées qui se disent laïques mais célèbrent le saint de leur prénom, et pour qui il n’est pas question de pousser la logique en faisant acte d’apostasie religieuse. Il n’est pas non plus question de jeter la pierre à la seule église catholique, car d’autres religions agissent de la sorte, comme par exemple la fatwa anti-maçonnique promulguée à La Mecque le 15 juillet 1978 par un « Comité des Grands Savants Musulmans ».

Cette Eglise catholique a condamné les courses de taureaux, et les condamne encore de nos jours, même si la tauromachie, religieuse par excellence ou par superstition, possède une forte domination de l’iconographie vouée au catholicisme. La première passe exécutée à la cape ne se nomme-telle pas la véronica, parce que donnée du même mouvement que fît Sainte Véronique lorsqu’elle utilisa un linge afin d’éponger le visage supplicié du Christ ? Une frange des gens d’Eglise n’a que faire de cet hommage symbolique, ni des comportements très respectueux envers elle des acteurs des arènes. Elle ne s’est pas privée d’excommunier les aficionados tout comme elle le fît des francs-maçons. Il est toutefois bon de faire ici remarquer aux lecteurs et lectrices de ces colonnes, que les dictateurs Franco et Pinochet n’ont toujours pas été excommuniés, pour ne parler que d’eux.

Cette Eglise Catholique, dont une association interne a édicté une pétition en 2007, intitulée Tous ensemble, sonnons le glas de la tauromachie, pétition à l’initiative de la « Fraternité sacerdotale internationale pour le respect de l’animal »**. Ce texte met en place une propagande sur des thèmes que ne démentiraient pas les contempteurs de la franc-maçonnerie. Thèmes récurrents comme celui de l’argent sale des lobbies de la tauromachie. Le fantasme du lobbies avec un financement occulte, étant aussi un thème abordé dans la doctrine anti-maçonnique, avec le mythe du banquier juif et de ses réseaux. Sans oublier dans cette pétition les accointances supposées du monde taurin avec le pouvoir politique, de par des subventions des écoles taurines. L’Etat se rendant aux yeux des abbés pétitionnaires, complice du danger non seulement corporel, mais mental qu’il fait courir à des mineurs. Il est dommage que l’église ne face pas un autre reproche à l’Etat, celui de laisser la libre diffusion à la télévision des images qui provoquent aux enfants des troubles graves constatés par des pédopsychiatres, ou de ne rien intenter contre la vente de certains jeux vidéos traumatisants pour nos chérubins.
Mais cette collusion étatique avec le monde taurin, est aussi un reproche fait à la franc-maçonnerie comme démontré dans l’ouvrage mentionné plus haut, mais aussi pour une frange de l’église catholique, et plus largement pour l’ensemble des doctrinaires de diverses religions, dont les fils symboliques d’une veuve seraient la cause d’une certaine permissivité établie de par la loi de séparation des églises et de l’Etat, fruit de réflexions initiales des francs-maçons. Une loi qui est la cause pour certains, du manque de repères religieux qui engendrerait la dégradation sociétale constatée en ces temps incertains. La franc-maçonnerie aussi cause de la dégradation du respect à la vie, de par la loi sur l’interruption volontaire de grossesse qui elle aussi est le résultat de réflexions dont les prémices démarrèrent dans des loges.

Que dire, toujours écrit dans la pétition de la « Fraternité sacerdotale internationale pour le respect de l’animal », de la dénonciation de ces écoles de tauromachie, qui embrigadent des enfants, dont certains à peine âgés de 7 ans, avec la complicité de certains directeurs, proviseurs, instituteurs ou professeurs aficionados, sous le couvert de leur apprendre une certaine culture espagnole ou de débattre sur la corrida. Les aficionados pourraient, au delà de toutes convictions religieuses ou philosophiques, retourner à juste titre le reproche qui leur est fait par la « Fraternité sacerdotale ». Le catéchisme mais aussi des enseignements pour « l’éveil à la foi pour les enfants de 3 à 7 ans » existe bel et bien au sein de l’Eglise Catholique, par contre il n’est pas question pour eux de considérer que les enfants qui assistent à ces réunions, soient des mineurs embrigadés dans des lieus où il est parlé religion sous couvert de leur apprendre une certaine culture religieuse ou de débattre sur l’Eglise. A chacun sa vision de l’endoctrinement suivant ses convictions…

L’idée du complot maçonnique, de l’intrusion des francs-maçons dans les rouages des systèmes politiques locaux, trouve son vis à vis lorsque les abbés à l’initiative de cette pétition, dénoncent ces maires et ses préfets qui ont souvent choisis d’être élus de villes taurines pour y assouvir leur passion malsaine. Les aficionados, aidés par les premiers magistrats des villes taurines, sont-ils ainsi supposés avoir le loisir de pénétrer les coulisses des communes ?
L’argent, toujours l’argent, avec ces organisateurs qui s’enrichissent sur le sadisme de spectateurs morbides, obnubilés par leur propre mort. Il est reproché aux aficionados de regarder la mort en face, tout comme cela est reproché aux francs-maçons, qui à certains degrés de leur cheminement approchent la réflexion sur la mort, et dont le thème n’est là aussi pas un tabou, contrairement à bon nombre de croyances qui apportent des réponses toutes faites sur l’inconnu, l’insondable. La franc-maçonnerie empiète sur l’un des fonds de commerce de la religion, la tauromachie d’une façon très symbolique, aussi.

Les prêtres pétitionnaires, affirment que leur sacerdoce est de guider les fidèles sur un chemin juste et droit. Ils se posent en rassembleurs des brebis égarées, de la même manière que leurs aînés allant imposer leur foi dans des contrées lointaines. Ils sous entendent ainsi que les aficionados sont censés être perdus, tout comme une partie de leur Eglise se propose de montrer le « véritable » chemin à ceux et celles égarés chez les « enfants de la veuve ».

(A suivre)

*http://leciegonaimepaslesgens.blogspot.com/2009/04/laborde-eructoreador-fuera-de-cacho.html
**http://www.animal-respect-catholique.org/petition_abolition_tauromachie.pdf