Afin de poursuivre la ligne fixée sur ce blog taurin, il était intéressant en cette période de grande froideur, d’aborder un pan de la vie d’un écrivain français, de surcroît aficionado a los toros. Que personne ne voit une quelconque redondance avec la communication présentée il y a à peine plus d’un an, lors du IVè colloque de « l‘Union des Bibliophiles Taurins de France »*. Où ce jour la, un sociétaire présenta un travail fort intéressant à propos de l’écrivain, polémiste, pamphlétaire, conférencier, franc-maçon et aficionado a los toros, Laurent Tailhade (1854-1919). C’est particulièrement sur cet aspect taurin, que l’homme de lettre tarbais attira l’attention de Jean-Claude Lassalle.
Car notre sociétaire de l’U.B.T.F. découvrit une missive originale de Laurent Tailhade adressée depuis « l’hôtel de La Poste » de Saint Jean de Luz, à un dénommé Carolus. Ce Carolus, d’après les recherches poussées de Jean-Claude Lassalle, serait Carolus-Duran, peintre et portraitiste des enfants et des femmes de la haute société de la troisième République. Cette missive de l’écrivain précise que le lendemain de son écrit, soit un 29 août, il doit se rendre à San Sébastian, pour y voir toréer Luis Mazzantini, le seul diestro de renom qu’il ne connaisse pas encore. A cette époque, l’auteur de entre autre, « La corne et l’épée », connaît déjà certaines gloires, comme Zola, Verlaine, Alphonse Allais, Aristide Bruand lui-même franc-maçon, mais aussi Sarah Bernhard.
Anarchiste et anti-clérical virulent, Laurent Tailhade est initié en franc-maçonnerie à Toulouse en 1887, soit un an avant de revenir définitivement à la vie parisienne. Car notre homme, après un premier mariage bourgeois en 1879, et dont l’épouse décèdera en 1883, monte une première fois à la capitale. La vie qu’il mène à Paris ne semble pas plaire à son géniteur qui lui coupe les vivres. Redescendu à Bagnère de Bigorre, Laurent Tailhade convole en seconde noce, mais cette dernière ne durera pas plus d’un an. Il est à croire que le fait d’avoir menacé d’un pistolet sa seconde épouse alors qu’elle voulait aller à la messe, n’a probablement pas contribué à une vie de couple paisible.
L’écrivain devient donc franc-maçon l’année de la séparation d’avec cette seconde épouse, il est initié dans la loge L’indépendance française du Grand Orient de France à Toulouse. C’était le 4 février 1887, année aussi de la publication de son premier texte taurin. L’année suivante, le 5 février 1888, il passe au degré de compagnon. C’est donc après cette date qu’il monte définitivement à la capitale, et qu’il demande son affiliation à la loge parisienne La Philosophie positive. Loge dans laquelle il accèdera au troisième degré le 5 février 1894. Notre écrivain aficionado a los toros, démissionnera de la franc-maçonnerie en 1906, ce qui ne l’a pas empêché d’être considéré comme un frère dont le zèle maçonnique est infatigable, comme la rapporte Léo Campion dans son ouvrage de référence sur la franc-maçonnerie et l’anarchisme**.
C’est durant son engagement maçonnique que Laurent Tailhade publia ses recueils les plus célèbres, en 1891 avec « Au pays du mufle », et 1900 pour « Imbéciles et gredins ». Mais c’est aussi durant cette période qu’il accentuera son anarchisme et anti-cléricalisme pourtant déjà bien en pointe. Certains des nombreux duels auxquels il participa sont devenus célèbre, tout comme les circonstances dans lesquelles il perdit un oeil, étant l’une des victimes du restaurant Foyot lors d’un attentat… anarchiste. A propos de cet acte, notre écrivain aficionado a los toros écrira que la lutte sociale actuelle m’intéresse comme une grande course de taureaux. J’ai été blessé par un taureau échappé.
Mais ce qui nous intéresse plus particulièrement sur ces colonnes, c’est que grâce au travail de Jean-Claude Lassalle suite à sa découverte de la lettre de Laurent Tailhade, nous savons que l’écrivain venait de renouer avec la passion des taureaux après cinq années sans voir de corridas, ceci seulement quelques mois avant son initiation maçonnique. La corrida de San Sébastian qu’évoque Tailhade dans sa missive, date de l’année 1886, car cette année la, le 29 août exactement, il rédige une lettre racontant un mano a mano entre Luis Mazzantini et « Cara Ancha » dans ses mêmes arènes. Cette lettre sera publié en 1898 sous le tire « Souvenir de taureaux ». Un sujet qui s’ajoute à une longue liste d’articles taurins que l’écrivain publia notamment dans « Terre Latine », mais aussi dans d’autres titres.
C’est à l’âge de 13 ans que Laurent Tailhade fait remonter son premier désir de toros, en racontant à sa mère une tentative avortée de se rendre à pied en Espagne pour y voir des toros bravos. Cette passion pour la tauromachie, sera aussi vive et excessive que bon nombre de ses engagements, et les adversaires taurins en feront les frais. Fidèle à ses convictions, comme il le montra tout au long de sa vie, Laurent Tailhade combattit les adversaires de la tauromachie, avec toute l’énergie et la verve qu’on lui connaît. Ceux qui écrivent aussi sur les toros en prendront pour leurs grades, dont Théophile Gautier et Maurice Barres. Critiques qui n’étaient pas celles d’un éventuel jaloux devant les textes de ces deux auteurs, mais bien des critiques de la part d’un véritable aficionado a los toros, dont la connaissance technique fût démontrée à maintes occasions.
Toutefois, dans son étude remarquable, Jean-Claude Lassalle soulève une petite curiosité, à savoir que Tailhade s’intéressa constamment à la personnalité de Luis Mazzantini. Notamment dans « La touffe de sauge », où l’auteur mentionne les qualités toreras ainsi que les goûts vestimentaires de Don Luis. Mais pour lui, le succès de Mazzantini était avant tout un succès de curiosité plutôt que d’admiration technique. Cet intérêt était-il le fait d’une certaine admiration du personnage atypique mais combien marquant de son époque, ou bien Laurent Tailhade savait-il que Luis Mazzantini était un frère ?
Dans quelques recherches il nous a été permis d’émettre de fortes hypothèses à l’occasions de rencontres entre Luis Mazzantini et des francs-maçons, mais nous pouvons dès à présent en écarter une. Nous pouvons ici affirmer que si il y eut une rencontre entre Don Luis et Laurent Tailhade, ce qui semble fort peu probable, elle ne fût pas sous le signe de l’équerre et du compas. Mazzantini était déjà franc-maçon lors de cette corrida à San Sébastian, mais pas notre écrivain. Et même si il se disait que Don Luis fît campagne aux Amériques afin de faire oublier son état de franc-maçon, mais aussi que ses détracteurs assuraient que les contrats étaient obtenus du simple fait qu’il fût membre de la franc-maçonnerie. Laurent Tailhade ne salua donc pas fraternellement Don Luis à l’issue de la corrida de San Sébastian en 1886.
*Les actes du colloque ont été publiés dans le numéro 48 de la revue des membres de « l’Union des Bibliophiles Taurins de France », parue au mois de novembre 2009.
Car notre sociétaire de l’U.B.T.F. découvrit une missive originale de Laurent Tailhade adressée depuis « l’hôtel de La Poste » de Saint Jean de Luz, à un dénommé Carolus. Ce Carolus, d’après les recherches poussées de Jean-Claude Lassalle, serait Carolus-Duran, peintre et portraitiste des enfants et des femmes de la haute société de la troisième République. Cette missive de l’écrivain précise que le lendemain de son écrit, soit un 29 août, il doit se rendre à San Sébastian, pour y voir toréer Luis Mazzantini, le seul diestro de renom qu’il ne connaisse pas encore. A cette époque, l’auteur de entre autre, « La corne et l’épée », connaît déjà certaines gloires, comme Zola, Verlaine, Alphonse Allais, Aristide Bruand lui-même franc-maçon, mais aussi Sarah Bernhard.
Anarchiste et anti-clérical virulent, Laurent Tailhade est initié en franc-maçonnerie à Toulouse en 1887, soit un an avant de revenir définitivement à la vie parisienne. Car notre homme, après un premier mariage bourgeois en 1879, et dont l’épouse décèdera en 1883, monte une première fois à la capitale. La vie qu’il mène à Paris ne semble pas plaire à son géniteur qui lui coupe les vivres. Redescendu à Bagnère de Bigorre, Laurent Tailhade convole en seconde noce, mais cette dernière ne durera pas plus d’un an. Il est à croire que le fait d’avoir menacé d’un pistolet sa seconde épouse alors qu’elle voulait aller à la messe, n’a probablement pas contribué à une vie de couple paisible.
L’écrivain devient donc franc-maçon l’année de la séparation d’avec cette seconde épouse, il est initié dans la loge L’indépendance française du Grand Orient de France à Toulouse. C’était le 4 février 1887, année aussi de la publication de son premier texte taurin. L’année suivante, le 5 février 1888, il passe au degré de compagnon. C’est donc après cette date qu’il monte définitivement à la capitale, et qu’il demande son affiliation à la loge parisienne La Philosophie positive. Loge dans laquelle il accèdera au troisième degré le 5 février 1894. Notre écrivain aficionado a los toros, démissionnera de la franc-maçonnerie en 1906, ce qui ne l’a pas empêché d’être considéré comme un frère dont le zèle maçonnique est infatigable, comme la rapporte Léo Campion dans son ouvrage de référence sur la franc-maçonnerie et l’anarchisme**.
C’est durant son engagement maçonnique que Laurent Tailhade publia ses recueils les plus célèbres, en 1891 avec « Au pays du mufle », et 1900 pour « Imbéciles et gredins ». Mais c’est aussi durant cette période qu’il accentuera son anarchisme et anti-cléricalisme pourtant déjà bien en pointe. Certains des nombreux duels auxquels il participa sont devenus célèbre, tout comme les circonstances dans lesquelles il perdit un oeil, étant l’une des victimes du restaurant Foyot lors d’un attentat… anarchiste. A propos de cet acte, notre écrivain aficionado a los toros écrira que la lutte sociale actuelle m’intéresse comme une grande course de taureaux. J’ai été blessé par un taureau échappé.
Mais ce qui nous intéresse plus particulièrement sur ces colonnes, c’est que grâce au travail de Jean-Claude Lassalle suite à sa découverte de la lettre de Laurent Tailhade, nous savons que l’écrivain venait de renouer avec la passion des taureaux après cinq années sans voir de corridas, ceci seulement quelques mois avant son initiation maçonnique. La corrida de San Sébastian qu’évoque Tailhade dans sa missive, date de l’année 1886, car cette année la, le 29 août exactement, il rédige une lettre racontant un mano a mano entre Luis Mazzantini et « Cara Ancha » dans ses mêmes arènes. Cette lettre sera publié en 1898 sous le tire « Souvenir de taureaux ». Un sujet qui s’ajoute à une longue liste d’articles taurins que l’écrivain publia notamment dans « Terre Latine », mais aussi dans d’autres titres.
C’est à l’âge de 13 ans que Laurent Tailhade fait remonter son premier désir de toros, en racontant à sa mère une tentative avortée de se rendre à pied en Espagne pour y voir des toros bravos. Cette passion pour la tauromachie, sera aussi vive et excessive que bon nombre de ses engagements, et les adversaires taurins en feront les frais. Fidèle à ses convictions, comme il le montra tout au long de sa vie, Laurent Tailhade combattit les adversaires de la tauromachie, avec toute l’énergie et la verve qu’on lui connaît. Ceux qui écrivent aussi sur les toros en prendront pour leurs grades, dont Théophile Gautier et Maurice Barres. Critiques qui n’étaient pas celles d’un éventuel jaloux devant les textes de ces deux auteurs, mais bien des critiques de la part d’un véritable aficionado a los toros, dont la connaissance technique fût démontrée à maintes occasions.
Toutefois, dans son étude remarquable, Jean-Claude Lassalle soulève une petite curiosité, à savoir que Tailhade s’intéressa constamment à la personnalité de Luis Mazzantini. Notamment dans « La touffe de sauge », où l’auteur mentionne les qualités toreras ainsi que les goûts vestimentaires de Don Luis. Mais pour lui, le succès de Mazzantini était avant tout un succès de curiosité plutôt que d’admiration technique. Cet intérêt était-il le fait d’une certaine admiration du personnage atypique mais combien marquant de son époque, ou bien Laurent Tailhade savait-il que Luis Mazzantini était un frère ?
Dans quelques recherches il nous a été permis d’émettre de fortes hypothèses à l’occasions de rencontres entre Luis Mazzantini et des francs-maçons, mais nous pouvons dès à présent en écarter une. Nous pouvons ici affirmer que si il y eut une rencontre entre Don Luis et Laurent Tailhade, ce qui semble fort peu probable, elle ne fût pas sous le signe de l’équerre et du compas. Mazzantini était déjà franc-maçon lors de cette corrida à San Sébastian, mais pas notre écrivain. Et même si il se disait que Don Luis fît campagne aux Amériques afin de faire oublier son état de franc-maçon, mais aussi que ses détracteurs assuraient que les contrats étaient obtenus du simple fait qu’il fût membre de la franc-maçonnerie. Laurent Tailhade ne salua donc pas fraternellement Don Luis à l’issue de la corrida de San Sébastian en 1886.
*Les actes du colloque ont été publiés dans le numéro 48 de la revue des membres de « l’Union des Bibliophiles Taurins de France », parue au mois de novembre 2009.
**« Le drapeau noir, l’équerre et le compas ».
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