jeudi 24 décembre 2009

Fin d'année taurine ... nouvelle année taurine...


L’aficionado a los toros aime, à la fin de l’année, effectuer le bilan de son activité tauromachique. Mais que le lecteur se rassure, l’activité de blog taurin atypique y échappera, il est nullement question dans ce billet, de regarder les premiers mois d’activités sur ces colonnes. Chacun et chacune, lecteur d’un jour, occasionnel ou bien assidu, aura lu les différents articles proposés, et de lui-même, fait sa propre opinion sur l’intérêt des textes proposés. Quant à la fréquentation de ce blog, le compteur parle à lui tout seul. Il est toutefois bon de rappeler ici, que ces colonnes n’ont reçu aucune publicité sur des sites ou blogs dont la fréquentation est extrêmement élevée. Seuls quelques amis animateurs d’autres blogs, ont mis en lien « Les deux arts », ceci de part l’amitié partagée sur les tendidos, ou la curiosité des sujets proposés.

Point de bilan disions-nous. Certes le mois de décembre marque la fin de l’année calendaire, mais pas la fin de toute activité. Même si pour quelques adorateurs des peurs sociétales, il se pourrait que le temps stoppe son œuvre en 2012, ou bien encore un peu plus tard avec les catastrophes que nous prédisent les adeptes de l’écologie politique. Une fin d’année où le vote catalan à propos de la tauromachie dans cette région, ne s’est pas soldé par le raz de marée annoncé par les abolitionnistes, et dont le débat va se poursuivre en montrant sa vraie nature. Une nature qui est tout d’abord un désir de supprimer dans cette région, tout ce qui a un lien avec le pouvoir de Madrid, et de s’en prendre aux libertés de ceux et celles qui ne conçoivent pas la vie comme eux.
Mais, chose curieuse pour nous qui nous intéressons ici-même à la tauromachie ainsi qu'aux sociétés initiatiques, cette atteinte au respect de la différence, s'est faite jour aussi à l’issue d’un vote au sein de la principale obédience maçonnique française, un vote négatif à propos de l’initiation féminine dans la structure. Divers journaux et autres sites internets, rapportent ce fait depuis le mois de septembre 2009, occultant volontairement le fond du sujet. Des quotidiens, hebdomadaires et blogs, ont critiqué la forme de ce refus, alors qu’il y eut un vote démocratique. Oubliant même de préciser que la franc-maçonnerie propose depuis des décennies des obédiences entièrement masculines ou bien exclusivement féminines, mais aussi mixtes. Une demande de mixité sexuelle, qui masque le manque d’une réelle mixité sociale. Ceci amenant même des attaques entre frères sur des forums, qui vont jusqu’à qualifier d’obscurantistes, et prédisant même lors d’échanges le port de la burka pour les femmes des frères considérés comme « non ouverts ». Pourtant, lors de leurs candidatures, ces membres désireux de la mixité sexuelle mais non sociétale, avaient la possibilité d’adhérer à une obédience mixte, et ont même la possibilité de changer d’obédience de nos jours. Pourquoi ne l’ont-ils pas fait, et le font-ils pas ? Mystère !

Chose amusante, ce sujet fût rapidement donné en exemple il y a peu par un intervenant sur un forum tauromachique. Une reprise sous la forme d’une seule phrase, lors d’une intervention laissant à penser à une misogynie exacerbée, plutôt qu’à une connaissance réelle du sujet.

Ce qui paraît surprenant de la part d’un mouvement philosophique dont les membres sont soient disant respectueux des avis différents, mais dont quelques uns n’hésitent pas à vouloir imposer leur vision, n’est malheureusement pas surprenant de la part des contempteurs taurins. Ces derniers, ayant profités de l’inaction de l’afición pendant bien longtemps, se sont fédérés et structurés au point de répandre à loisir leur morale sociétale, et insultants dans la plus parfaite impunité les aficionados a los toros. Pour contrer cela, une partie des aficionados réagit depuis quelques temps, et le dernier congrès de l’Union des Villes Taurines de France, vient d’officialiser la démarche pour une demande de reconnaissance de la tauromachie auprès de l’UNESCO. Bien entendu, la démarche ne plaît pas à l’ensemble des aficionados français, pour des raisons qui leurs sont propres et toutes respectables. Mais il n’empêche que devant le désaccord, une fois de plus dirions-nous, pour certains aficionados a los toros en cette fin d’année, c’est un sentiment d’afición désabusée qui se fait jour. Quand arriverons-nous à être d'accord au moins sur ce point ?
Comme le débat sur la mixité sexuelle est récurent depuis des années dans les murs de la principale obédience maçonnique française, nous sommes en droit de craindre que toute initiative pour s’efforcer de rendre pérenne la culture taurine, ne devienne tout aussi redondante. Et l’on en est presque à parier que dans ce domaine aussi, dans un an nous en serrons au même point quant à la fédération de l’afición française pour combattre ceux et celles qui en veulent à notre liberté de vivre comme nous l’entendons, à savoir aimer la tauromachie.
Alors que pendant que des tolérants pourfendent ceux qui ne voient pas leurs vies associatives comme eux, que l’afición hexagonale reste divisée sur des actions ou non actions à mener, des passionnés de tauromachie continuent leur cheminement. Cheminement que nous reprendrons ici-même dès les premiers jours du mois de janvier. En attendant, nous espérons que pour tous ceux et celles, visiteurs assidus de ces colonnes, la prochaine année apportera force et vigueur pour mener à bien leurs souhaits les plus chers.

mercredi 16 décembre 2009

Laurent Tailhade, écrivain, franc-maçon et aficionado a los toros.


Afin de poursuivre la ligne fixée sur ce blog taurin, il était intéressant en cette période de grande froideur, d’aborder un pan de la vie d’un écrivain français, de surcroît aficionado a los toros. Que personne ne voit une quelconque redondance avec la communication présentée il y a à peine plus d’un an, lors du IVè colloque de « l‘Union des Bibliophiles Taurins de France »*. Où ce jour la, un sociétaire présenta un travail fort intéressant à propos de l’écrivain, polémiste, pamphlétaire, conférencier, franc-maçon et aficionado a los toros, Laurent Tailhade (1854-1919). C’est particulièrement sur cet aspect taurin, que l’homme de lettre tarbais attira l’attention de Jean-Claude Lassalle.

Car notre sociétaire de l’U.B.T.F. découvrit une missive originale de Laurent Tailhade adressée depuis « l’hôtel de La Poste » de Saint Jean de Luz, à un dénommé Carolus. Ce Carolus, d’après les recherches poussées de Jean-Claude Lassalle, serait Carolus-Duran, peintre et portraitiste des enfants et des femmes de la haute société de la troisième République. Cette missive de l’écrivain précise que le lendemain de son écrit, soit un 29 août, il doit se rendre à San Sébastian, pour y voir toréer Luis Mazzantini, le seul diestro de renom qu’il ne connaisse pas encore. A cette époque, l’auteur de entre autre, « La corne et l’épée », connaît déjà certaines gloires, comme Zola, Verlaine, Alphonse Allais, Aristide Bruand lui-même franc-maçon, mais aussi Sarah Bernhard.

Anarchiste et anti-clérical virulent, Laurent Tailhade est initié en franc-maçonnerie à Toulouse en 1887, soit un an avant de revenir définitivement à la vie parisienne. Car notre homme, après un premier mariage bourgeois en 1879, et dont l’épouse décèdera en 1883, monte une première fois à la capitale. La vie qu’il mène à Paris ne semble pas plaire à son géniteur qui lui coupe les vivres. Redescendu à Bagnère de Bigorre, Laurent Tailhade convole en seconde noce, mais cette dernière ne durera pas plus d’un an. Il est à croire que le fait d’avoir menacé d’un pistolet sa seconde épouse alors qu’elle voulait aller à la messe, n’a probablement pas contribué à une vie de couple paisible.

L’écrivain devient donc franc-maçon l’année de la séparation d’avec cette seconde épouse, il est initié dans la loge L’indépendance française du Grand Orient de France à Toulouse. C’était le 4 février 1887, année aussi de la publication de son premier texte taurin. L’année suivante, le 5 février 1888, il passe au degré de compagnon. C’est donc après cette date qu’il monte définitivement à la capitale, et qu’il demande son affiliation à la loge parisienne La Philosophie positive. Loge dans laquelle il accèdera au troisième degré le 5 février 1894. Notre écrivain aficionado a los toros, démissionnera de la franc-maçonnerie en 1906, ce qui ne l’a pas empêché d’être considéré comme un frère dont le zèle maçonnique est infatigable, comme la rapporte Léo Campion dans son ouvrage de référence sur la franc-maçonnerie et l’anarchisme**.

C’est durant son engagement maçonnique que Laurent Tailhade publia ses recueils les plus célèbres, en 1891 avec « Au pays du mufle », et 1900 pour « Imbéciles et gredins ». Mais c’est aussi durant cette période qu’il accentuera son anarchisme et anti-cléricalisme pourtant déjà bien en pointe. Certains des nombreux duels auxquels il participa sont devenus célèbre, tout comme les circonstances dans lesquelles il perdit un oeil, étant l’une des victimes du restaurant Foyot lors d’un attentat… anarchiste. A propos de cet acte, notre écrivain aficionado a los toros écrira que la lutte sociale actuelle m’intéresse comme une grande course de taureaux. J’ai été blessé par un taureau échappé.

Mais ce qui nous intéresse plus particulièrement sur ces colonnes, c’est que grâce au travail de Jean-Claude Lassalle suite à sa découverte de la lettre de Laurent Tailhade, nous savons que l’écrivain venait de renouer avec la passion des taureaux après cinq années sans voir de corridas, ceci seulement quelques mois avant son initiation maçonnique. La corrida de San Sébastian qu’évoque Tailhade dans sa missive, date de l’année 1886, car cette année la, le 29 août exactement, il rédige une lettre racontant un mano a mano entre Luis Mazzantini et « Cara Ancha » dans ses mêmes arènes. Cette lettre sera publié en 1898 sous le tire « Souvenir de taureaux ». Un sujet qui s’ajoute à une longue liste d’articles taurins que l’écrivain publia notamment dans « Terre Latine », mais aussi dans d’autres titres.

C’est à l’âge de 13 ans que Laurent Tailhade fait remonter son premier désir de toros, en racontant à sa mère une tentative avortée de se rendre à pied en Espagne pour y voir des toros bravos. Cette passion pour la tauromachie, sera aussi vive et excessive que bon nombre de ses engagements, et les adversaires taurins en feront les frais. Fidèle à ses convictions, comme il le montra tout au long de sa vie, Laurent Tailhade combattit les adversaires de la tauromachie, avec toute l’énergie et la verve qu’on lui connaît. Ceux qui écrivent aussi sur les toros en prendront pour leurs grades, dont Théophile Gautier et Maurice Barres. Critiques qui n’étaient pas celles d’un éventuel jaloux devant les textes de ces deux auteurs, mais bien des critiques de la part d’un véritable aficionado a los toros, dont la connaissance technique fût démontrée à maintes occasions.

Toutefois, dans son étude remarquable, Jean-Claude Lassalle soulève une petite curiosité, à savoir que Tailhade s’intéressa constamment à la personnalité de Luis Mazzantini. Notamment dans « La touffe de sauge », où l’auteur mentionne les qualités toreras ainsi que les goûts vestimentaires de Don Luis. Mais pour lui, le succès de Mazzantini était avant tout un succès de curiosité plutôt que d’admiration technique. Cet intérêt était-il le fait d’une certaine admiration du personnage atypique mais combien marquant de son époque, ou bien Laurent Tailhade savait-il que Luis Mazzantini était un frère ?

Dans quelques recherches il nous a été permis d’émettre de fortes hypothèses à l’occasions de rencontres entre Luis Mazzantini et des francs-maçons, mais nous pouvons dès à présent en écarter une. Nous pouvons ici affirmer que si il y eut une rencontre entre Don Luis et Laurent Tailhade, ce qui semble fort peu probable, elle ne fût pas sous le signe de l’équerre et du compas. Mazzantini était déjà franc-maçon lors de cette corrida à San Sébastian, mais pas notre écrivain. Et même si il se disait que Don Luis fît campagne aux Amériques afin de faire oublier son état de franc-maçon, mais aussi que ses détracteurs assuraient que les contrats étaient obtenus du simple fait qu’il fût membre de la franc-maçonnerie. Laurent Tailhade ne salua donc pas fraternellement Don Luis à l’issue de la corrida de San Sébastian en 1886.


*Les actes du colloque ont été publiés dans le numéro 48 de la revue des membres de « l’Union des Bibliophiles Taurins de France », parue au mois de novembre 2009.

**« Le drapeau noir, l’équerre et le compas ».

vendredi 11 décembre 2009

Le gardien.


Malgré la subjectivité que représente toute mesure basée sur le constat ou le ressenti humain, l’aficionado a los toros possède en lui cette tendance, qui est de vouloir mesurer le sérieux d’une arène suivant ses propres critères tauromachiques. L’on trouve les aficionados pour qui l’importance d’une arène, se reflète dans le nombre de figuras qui y assurent le paseo, et avec cela le nombre d’appendices octroyés dans une tarde. En vis-à-vis, et souvent revendiqué en opposition, l’on trouve les aficionados pour qui l’importance, le sérieux d’une arène, se retrouve dans sa capacité à faire appliquer les fondamentaux de la lidia du toro bravo et de voir les coletudos s’en acquitter sans sourciller.

Même si ces deux visions tauromachiques sont opposées, car les hommes ainsi que le bétail que l’on trouve dans l’une ne se trouve que peu souvent dans l’autre catégorie de plaza, rien n’interdit à chacun, quel que soit son idéal taurin, de vouloir appliquer une autre mesure. Celle qui consiste à ce que la direction d’une arène, empresa mais aussi présidence, démontre un réel intérêt à l’application du rite taurin dans ses moindres détails.

Peine perdue penseront certains, car depuis longtemps le sens du rite tauromachique a en grande partie disparu. Cette perte du sens même du rite, n’est pas le simple fait d’une vision tauromachique sur la quelle il serait trop facile de pointer l’index, afin de dénoncer une évolution plus axée vers le spectacle que vers le combat. Cela va bien plus loin, car il s’agit bien de l’ensemble de la société contemporaine perdant ses bases rituéliques, hormis pour imposer des rites négatifs basés sur les seuls interdits, en unique réponse aux craintes de l’avenir.

Aussi, lorsque au début du mois de décembre la chaîne de télévision « TV Andalucia » proposa la retransmission d’une corrida depuis la plaza de toros de Quito, l’aficionado attaché au rite tauromachique eut une belle petite surprise. Même si pendant cette corrida célébrée en la capitale équatorienne, l’indulto du troisième toro laissa une grande amertume, tant son comportement sous la puya ne montra aucun trait pouvant laisser entrevoir la moindre grâce, le comportement du gardien du toril au moment du paseo attira l’attention.

Une attention retenue de par son salut envers la présidence, par trois fois, entre le début du paseo et la sortie du premier bicho. Alors qu’il est souvent observé un simple salut, unique et furtif, cette attitude marquée vers l’autorité de la course, et que cette dernière rendait, démontrait toute l’importance de sa fonction. L’importance que le torilero s’accordait, mais aussi et surtout, l’importance que lui accorde la présidence. Dans ce que l’on pourrait voir comme un simple micro-rituel démontrant le respect, l’on trouve une mise en forme, une officialisation de la fonction de gardien du toril. Une marque de respect et d’importance dans cet espace d’une expression théâtralisée, où la mort du toro répond aux interrogations que se font les hommes et les femmes autour de leur propre mort. Ce salut n’est pas un simple bonjour servant à établir le contact entre protagonistes, mais bien un signe d’union, acte de respect mutuel et de définition d’existence au monde. Cet acte permet de redonner toute sa place à cette fonction de l’ombre, appartenance au monde des acteurs du rite qui va s’accomplir.

Observer ce salut appuyé, à fait naître dans l’esprit, ce que certains pourront qualifier de simple digression, mais qui au-delà de cette vision basique, force à une autre approche. Surtout lorsque l’on s’intéresse à quelques sujets de réflexions, que l’on est pas hermétique à certaines perceptions atypiques du monde et des mondes. C’est ainsi que l’on voit le gardien du toril non pas comme un simple intervenant ponctuel dans le décorum de l’art de Cuchares, mais bien comme un acteur à part entière du ruedo. Et le lecteur, ou la lectrice, assidu de ces colonnes, aura sûrement compris qu’à travers le rôle du torilero, l’on perçoit une certaine similitude avec une fonction remplie dans les rituels de la franc-maçonnerie.

La situation du torilero à même le ruedo, opposée à la présidence, n’est pas sans faire songer à celle de la fonction du couvreur d’une loge de franc-maçon. Le président d’une loge pendant une réunion, est positionné de façon surélevée par rapport à l’assemblée et faisant face au gardien de temple maçonnique, le fameux frère couvreur. Celui-ci étant l’ancien président ayant laissé son vénérala, passant ainsi de la fonction la plus haute à la plus humble. Toutefois, ce qui lien allégorique qui existe entre ces deux gardiens, est de l’ordre de l’importance de leurs rôles respectifs. La lecture de rituels maçonniques disponibles sur le net, ou bien les informations données par divers auteurs maçonniques dans leurs ouvrages, le montre pour le couvreur. Apparu en 1813, suite au doublement de la fonction de tuileur, le couvreur a pour mission de garder la loge close au regard du monde extérieur. Toute personne qui frappe à la porte se voit d’abord accueillie par lui, et tout malveillant est repoussé de la pointe de l’épée, de façon défensive. Il est le relai entre le président et les frères qui se trouvent sur les parvis et demandent à entrer, il s’adresse au président par l’intermédiaire des surveillants des colonnes, ou bien directement au président suivant les dispositions de certains rituels.

Changeons quelques mots, et nous pouvons sans peine transposer le couvreur d’une loge maçonnique au rôle de gardien du toril. Nul ne peut accéder au ruedo via le toril sans passer par son gardien. Il prend ses ordres de la présidence, via les alguacils ou bien directement du palco suivant la situation, pour permettre l’entrée du toro en piste, mais aussi lors du changement de ce dernier si il y a lieu. Il reçoit les clefs du toril directement du président, ce dernier lui déléguant ainsi la régulation du combat. Car même si la présidence fait sonner les clarines pour donner les ordres, il n’en demeure pas moins que la sortie en piste des bichos est gérée physiquement par le torilero. Et ce pouvoir se retrouve aussi chez le couvreur d’une loge maçonnique, qui armé d’une épée, même dissuasive, prolongement de l’épée flamboyante du président, quand celle-ci n’est pas elle-même en possession du couvreur comme l’indiquent certains rituels.

Peut être que parmi ceux et celles qui viennent de lire ces lignes, quelques personnes se diront que nous voulons absolument trouver des liens entre notre passion pour la tauromachie et la franc-maçonnerie. Aussi, arrêtons la comparaison, et laissons volontairement au lecteur occasionnel mais aussi assidu de ces colonnes, l'envie d’approfondir la représentation que peuvent lui signifier les deux gardiens.

mercredi 2 décembre 2009

"Les anges jouent des maracas".


L’hiver approchant en Europe, l’aficionado a los toros continu de vivre sa passion de diverses façons, notamment par la littérature taurine. Le hasard des navigations internautiques ainsi que l’intérêt pour la littérature contemporaine, ont permis il y a peu de découvrir la publication en France, d’un roman policier écrit par un auteur cubain.

Pourquoi parler d’un tel livre sur un blog taurin, certes atypique, mais qui se veut traiter tout de même de tauromachie ?
Tout d’abord parce que les revues taurines ou les sites taurins, n’informent pas tous des diverses parutions, ni de tous les livres ayants dans leurs pages des faits plus ou moins proches des toros. Il existe même des publications, qui choisissent de taire volontairement des lectures taurines particulières, du seul fait que le fond du sujet dérange.

Parler du roman policier de Angel Tomás Gónzalez Ramos, « Les anges jouent des maracas »*, et publié au mois de juin 2009 par les éditions « L’atinoir », n’est certes pas décalé sur un blog taurin, et encore mois sur celui-ci. Lorsque le lecteur ou la lectrice assidu de ces colonnes, saura que sur la quatrième de couverture l’on peut y lire que l’intrigue se déroule à La Havana en 1887, et que Luis Mazzantini est mentionné se produisant dans le ruedo cubain pour un seul contre six en présence de Sarah Bernhard, le voile de l’interrogation éventuelle sera levé.

L’objet du présent article n’est en aucun cas d’émettre une critique tant sur le fond que sur la forme du roman, mais plutôt de porter à la connaissance de l’aficionado a los toros qui s’arrête ici, un nouveau livre où la tauromachie est présente, même de loin. Il est important de noter que les éditions « L’atinoir », ont pour habitude d’introduire le texte d’une préface rédigée par l’auteur, ceci afin de proposer au lecteur une rencontre avec l’écrivain. C’est ainsi que l’on apprend de l’auteur lui-même, que le fond historique de son livre est basé sur des recherches consacrées à découvrir le passé cubain au travers, entre autre, des journaux de l’époque. De cette façon, l’auteur donne au lecteur un aperçu de l’aristocratie de la capitale cubaine, avec ses intrigues politiques, ses débauches, dans cette période d’entre deux guerres coloniales.

Dès lors, le visiteur présent depuis longtemps sur ces colonnes, éprouvera certainement un intérêt pour ce roman. L’hôtel « Petit » que nous avons mentionné dans un précédent article sur la relation entre Don Luis et l’actrice, cet hôtel où réside Sarah Bernhard, y est décrit ainsi que son propriétaire. L’actrice est même interrogée par le policier chargé de l’enquête, et nous la découvrons dans sa chambre, où animaux et cercueil l’accompagnent.
Dans ce roman, il y a une nouvelle fois une allusion de l’initiation en franc-maçonnerie de Luis Mazzantini. Cela ne relève pas du scoop pour nous, mais l’on peut y voir ici aussi l’idée répandue que le maestro vînt toréer de l’autre côté de l’océan pour le simple fait de vouloir faire oublier son engagement maçonnique. Comme nous l’avons déjà écrit et développé dans « L’équerre, le compas, les toros »**, cette idée semble peut probable.

Même si Luis Mazzantini n’entre réellement en scène dans ce roman qu’à partir de la page 121, le billet transmis par l’actrice au torero et invitant ce dernier à la rejoindre dans sa chambre d’hôtel est aussi évoqué. Il est remis à Don Luis dans un contexte différent que celui vu récemment sur ces colonnes, mais il est mentionné et se voit même attribué quelques lignes. Avant de rejoindre l’actrice dans son intimité, Luis Mazzantini doit affronter en solitaire six toros. Une corrida lors de laquelle le maestro brise en deux l’épée d’estocade, comme cela lui arriva réellement à Madrid.
Cette corrida cubaine est aussi l’occasion de voir une fois de plus pointé l’intérêt du maestro concernant sa vêture, et ceci étant pour l’auteur du roman, ce qui a fait avant tout la renommée de Don Luis. Raccourci quelque peu réducteur, surtout lorsque l’on sait que Luis Mazzantini fût un spécialiste de l’estocade a volapié, ainsi que l’un des initiateurs du sorteo. Même si il est vrai que le torero fût, et est encore, une référence en la matière de traje, comme le souligne Marc Thorel dans sa communication présentée au dernier colloque de l’Union des Bibliophiles Taurins de France ***. Une référence que souligne aussi Sandra Alvarez Molina, lorsque elle mentionne dans son étude « La corrida vue des gradins »****, les différentes parties d’une garde robe masculine de l’époque, portant l’emprunte de Mazzantini.

L’aficionado a los toros, trouvera intéressant à la lecture de ce roman, la façon dont est narrée la relation amoureuse entre Sarah Bernhard et Don Luis. Ce roman nous invite, dans quelques lignes intitulées « la corrida secrète du torero et de la diva », à ce qui a probablement créé un grand fantasme dans la bourgeoisie cubaine, lorsque la relation entre l’actrice française et le torero commença à s’ébruiter. Une relation qui toutefois n’est toujours pas avérée en l’état actuel des recherches. Cette partie du roman, qui disons le tout net, n’apporte aucun intérêt taurin, se voit écourtée de bien drôle de façon, mettant le lecteur dans l’attente de la suite de l’intrigue.

« Les anges jouent des maracas », n’est donc pas un roman tauromachique, mais bien un roman policier. Mais en cette saison hivernale pour l’aficionado a los toros européen, il offre une lecture agréable où les toros sont présents. Il permet aussi de sentir l’atmosphère cubaine de cette époque qui n’avait pas encore tourné le dos à la tauromachie. Une époque que nous n’avons pas l’habitude d’approcher dans les lectures taurines contemporaines, et qui au travers d’une intrigue, nous permet de découvrir et de redécouvrir les temps du maestro Luis Mazzantini.


* « Les anges jouent des maracas », Angel Tomás Gónzalez Ramos, éditions L’atinoir, juin 2009. Titre original « Los àngeles tocan maracas », 2008.
** « L’équerre, le compas, les toros », éditions CAIRN, mars 2009.
*** Voir un article précédent sur ces colonnes, à propos du numéro 48 de la revue de l’U.B.T.F., publié au mois de novembre 2009.**** « La corrida vue des gradins :afición et réception (1900-1940) », de Sandra Alvarez Molina. CREC, Université Paris III.

dimanche 22 novembre 2009

Arènes sanglantes, suite...


Il y a quelques semaines maintenant, il a été proposé sur ces colonnes, une approche peu commune du livre de Vicente Blasco Ibañez, « Arènes sanglantes » (Sangre y arena). Nous avons abordé dans ce premier article, les représentations de certains acteurs taurins en rapport avec le monde maçonnique que connaissait l’auteur, mais aussi une perception de l’approche des voyages symboliques faite par l’écrivain franc-maçon ibérique dans les premières pages de son livre.

Poursuivant la lecture de cette œuvre, l’on ne peut s’empêcher de s’interroger sur la possibilité de nouvelles allusions de Blasco Ibañez vis à vis de la franc-maçonnerie, dans ce texte abordant la tauromachie.
Et l’on constate qu’après avoir décrit les alguazils effectuant le despejo, l’auteur évoque la vision que les toreros ont lorsque ces derniers sont dans la patio de caballos, à l’instant où ils vont entrer dans le ruedo. L’auteur écrit que les portes de la voûte s’ouvrirent complètement, et c’est alors qu’apparût aux toreros le redondel large cercle sablé où allait se jouer la tragédie. Viennent alors à l’esprit les descriptions des cérémonies initiatiques relatées dans divers ouvrages, et notamment dans la littérature abondante d’auteurs francs-maçons. N’est-il pas fait allusion ici à la surprise des premiers instants où le postulant aperçoit le monde qui l’entoure, lorsque le bandeau tombe et que sa vision s’ouvre à l’ensemble du décor et de l’assistance, telle la voûte de la porte du patio de caballos qui, ouverte, permet aux acteurs taurins de voir la piste mais aussi les différents aficionados qui ont pris places. Ce rapprochement entre le moment où les toreros vont entrer dans le temple taurin et les premiers instants du candidat à l’initiation maçonnique, comme le vivent les francs-maçons et donc comme l’a vécu Vicente Blasco Ibañez, est renforcé dans le texte par cette phrase et les toreros dont les yeux clignaient, éblouis par cette violente transition, sortirent de l’ombre à la lumière. Ceci est l’exacte description des nombreux ressentis de la plupart des francs-maçons lorsque l’on discute avec eux, et que ces derniers livrent leurs impressions initiatiques au moment où ils découvrent ce monde nouveau. L’écrivain semble ainsi établir une similitude entre les premiers pas des toreros dans les arènes, et ceux des nouveaux francs-maçons dans leurs temples.

Si la rédaction et la publication des aventures taurines de Juan Gallardo se déroule pendant la période anti-flamenquiste, il nous faut pour être tout à fait honnête, souligner que Blasco Ibañez laisse poindre dans son récit, ce que l’on peut penser être une certaine aversion tauromachique. Mais contrairement à une grande majorité des détracteurs taurins, qu’ils aient été ses contemporains ou qu’ils soient du début du XXIè siècle, l’on constate à lire l’écrivain qu’il porta tout de même un réel désir de connaître le monde taurin, au point de ne pas réaliser un bas amalgame rejetant en bloc les matadors, les spectateurs et toute la force de la symbolique tauromachique. Ceci, sûrement afin de ne pas occulter les différents aspects symboliques auxquels ils n’étaient pas insensible, étant donné son engagement philosophique. Une approche allégorique, bien mieux réalisée que par certains aficionados ou se prétendants tels.
C’est pour cela que malgré les critiques envers les attitudes d’aficionados ou bien d’acteurs taurins, Blasco Ibañez évoque dans son récit à propos des toreros entrants dans la plaza de toros, qu’à mesure qu’ils cheminaient, dans l’arène, les toreros se sentaient d’autres hommes. Ils exposaient leurs vies pour autre chose que de l’argent. Les hésitations, la terreur de l’inconnu, ils avaient laissé tout cela derrière la clôture. Cette description n’est pas elle aussi, sans faire songer à une vision maçonnique. Il est dit dans divers ouvrages consacrés à la symbolique de cette institution issue du siècle des Lumières, que les initiés cheminent intellectuellement tout au long de leur parcours maçonnique, mais aussi qu’ils sont d’autres hommes et femmes que si ils étaient restés profanes. L’on peut aussi très bien faire le parallèle avec les hésitations et la peur, que rencontrent toute personne intéressée par un cheminement philosophique. Comme le matador hésite et a peur pendant la lidia, l’initié hésite dans ses réflexions et a parfois peur dans son étude de l’approche de la mort. Mais tous possèdent cette attitude commune, pour les toreros de laisser leur être profane à la tauromachie derrière la clôture, et les francs-maçons de ne pas faire entrer leurs a priori et leurs quotidiens dans le temple.

Lors de la narration de la première corrida du matador Juan Gallardo, personnage central de l’œuvre dont il est question, il est amusant de noter que l’auteur n’a pu s’empêcher de faire sous-entendre ce que peuvent lui renvoyer certains hommes à propos des croyances religieuses. N’écrit-il pas, concernant des aficionados fervents admirateurs de tel ou tel torero, qu’ils s’indignaient avec la furieuse intolérance du croyant qui voit mettre en doute les miracles de son saint. Si l’orientation de l’idéal philosophique de l’auteur n’est pas ici clairement exprimé, c’est à dire adogmatique, cela en reste bien imité.

Bien entendu, il nous est impossible d’affirmer que Vicente Blasco Ibañez voulut réellement laisser poindre des similitudes entre la franc-maçonnerie et la tauromachie dans l’écriture de son roman. A ceci, seul l’auteur pourrait répondre, et donc cette interrogation restera toujours en l’état. Mais la lecture des deux premiers chapitres, avec pour scène centrale la corrida de toros dans les arènes de Madrid, peut laisser imaginer que cette dernière puisse être en quelques points une allégorie d’une réunion de francs-maçons. De plus, il est intéressant de noter que l’écrivain cadre la course par des scènes que l’on retrouve dans l’environnement de réunions. En début du roman, Juan Gallardo aime à se retrouver dans la salle à manger de l’hôtel, observant les personnes qui s’y trouvent, assistant à des conversations de groupes formés par affinités. Mais aussi, une fois habillé, il est invité par un garçon de l’hôtel, à prendre place dans la voiture qui doit le mener aux arènes. Un garçon d’hôtel en guise de maître de cérémonie, invitant le maestro à aller prendre place au milieu du collège formé par la cuadrilla. A la fin du chapitre II, lorsque le matador retourne à sa chambre d’hôtel on le retrouve entouré d’une foule de personnes, interpellé sur la qualité de sa prestation dans le temple taurin. Ceci comme un conférencier est souvent interpellé par quelques personnes de l’auditoire, afin de poursuivre le débat sur le sujet évoqué par lui.

Dans le récit de la corrida de toros madrilène en ouverture du roman, l’écrivain franc-maçon qu’était Vicente Blacso Ibañez, fait part d’altercations émanant des spectateurs. Il est alors amusant de constater qu’elles proviennent des seuls tendidos 3 et 5. C’est alors que se pose une question pour l’aficionado a los toros curieux, pourquoi le choix de ces numéros de tendidos et non pas d’autres. Pourquoi est-ce au tendido 3, chiffre de l’apprenti franc-maçon, il y a du grabuge ? Pourquoi est-ce au tendido 5, chiffre du compagnon franc-maçon, que l’on se cogne ?
Si un lecteur ou une lectrice de ces colonnes possède un début de réponse…

(A suivre…)

lundi 16 novembre 2009

Union des Bibliophiles Taurins de France, la "Gazette" numéro 48.


Les premiers jours de ce mois de novembre 2009, viennent de voir paraître le numéro 48 de la « Gazette », revue interne des membres de l’Union des Bibliophiles Taurins de France.
Cette association est née le 1er février 1977, sur l’initiative de Auguste Laffront (Paco Tolosa), Paul Casanova, Pierre Dupuy, Jean-Louis Lopez, Jacques Thome et Marc Thorel. Comptant à ce jour 160 socios, l’association est forte de cinquante-six ouvrages publiés, sans compter les numéros de la revue « Gazette ». Les ouvrages édités par l’U.B.T.F., le sont dans les domaines tels que l’histoire des villes taurines françaises, l’histoire taurine générale, la bibliophilie-bibliographie taurine, les arts et la littérature tauromachique, les biographies et essais sur le monde des toros. Ces publications sont toutes le fruit d’un travail des plus sérieux de chacun des auteurs, et font références dans le domaine taurin. Des ouvrages à tirages limités, des pièces rares que l’on peine à se procurer une fois les exemplaires épuisés, car il n’y a pas de réimpression .

L’Union des Bibliophiles Taurins de France, organise depuis 2002 un colloque qui se déroule tous les deux ans, et dont l’une des particularités, est de pouvoir écouter comme conférenciers des seuls membres de l’association. Le dernier en date, le IVè colloque, s’est déroulé le samedi 08 novembre 2008 à Mauguio dans le département de l’Hérault, et ce sont les actes de ce colloque que propose le numéro 48 de la « Gazette ».

L’on trouve en introduction à ce numéro, un hommage à Jean François, membre de l’association, collectionneur de cartes postales taurines, auteurs de livres tauromachiques. Un vibrant hommage, qui lui a été rendu lors du dernier colloque.

Viennent ensuite les différentes communications qui ont pu être écoutées lors de ce IVè colloque de l’U.B.T.F. C’est Marc Thorel qui ouvre cette publication des actes, comme il ouvrît plaza lors du colloque, avec une communication intitulée « Le costume des toreros français « historiques » (1890-1910), d’après les cartes postales de la collection de Jean François ». Partant du constat que les toreros français de l’époque, avaient pris soin de quelques libertés vis à vis de la corrida de toros de leurs cousins ibériques, libertés ayant pour sources divers facteurs, Marc Thorel a poussé ses investigations sur une éventuelle évolution du traje de luce de nos aïeux. C’est ainsi que nous voyageons aux grés des trajes, de Bayard à Maria Gentis en passant par « Pouly » et Paul Grégroire, et que nous est narrée tout en étant illustrée de reproductions de clichés de l’époque, l’évolution du costume des toreros français, depuis la montera jusqu’aux zapatillas.

C’est ensuite au tour de Jean-Yves Bauchu de présenter une communication intitulée « Christian Dedet, médecin, écrivain, tauromache… », dans lequel il nous livre le parcours du médecin-écrivain démarrant le 12 janvier 1959, jour où il reçoit une lettre qui orientera sa vie. Christain Dedet verra publié son premier roman « Le plus grand des taureaux », puis « La fuite en Espagne », « Passion tauromachique », ainsi que divers écrits taurins du médecin-écrivain que nous raconte le docteur Jean-Yves Bauchu. Il nous parle de son confrère, qu’il a longuement rencontré, non pas sous la forme d’un simple résumé de lecture, mais bien en qualité de bibliophile taurin, en découvrant le sens profond de chacun des textes. Pour conclure son propos, le conférencier apporte des réponses à quelques interrogations, qu’il livre à la sagacité de l’auditoire.

La troisième communication sera ici volontairement passée sous silence. Le lecteur assidu de ces colonnes comprendra aisément pourquoi, surtout lorsqu’il saura que le titre en est «La puya, l’équerre et le compas : quand la franc-maçonnerie et la tauromachie se rencontrent ». Il sera juste souligné ici, que Marc Thorel a illustré cette communication que j’ai eu le plaisir de présenter, par une photographie très rare de Luis Mazzantini, dont le traje de luce est orné de deux colombes.

Le cartel des actes du IVè colloque de l’U.B.T.F., se poursuit avec la communication de Jacques Dalquier qui devrait aussi intéresser les amateurs de l’histoire méridionale, s’intitulant « Gaston Phoebus, empresa ? »
Jacques Dalquier fait référence à une note de bas de page de Pierre Duffaut dans son ouvrage « Histoire de Mazères », ou il est question de spectacles prodigués par Gaston Phoebus envers le Roi, dont des courses de taureaux. Le conférencier nous livre l’origine de cette citation, remontant à 1832, suite à la publication de « Voyages à Rennes-les-Bains » de Labouisse-Rochefort. Reprenant le passage de ce livre dans lequel il est question du combat des hommes et des taureaux, avec toute la verve et l’imagination de l’auteur érudit et imaginatif du XIXè siècle, Jacques Dalquier offre les clés d’une plus vaste investigation pour les aficionados a los toros passionnés d’histoire.

Il est à présent question dans ce numéro de la « Gazette » de l’U.B.T.F., d’une communication intitulée « Une lettre de Laurent Tailhade », nous narrant une missive autographe de l’écrivain, que découvrit Jean-Claude Lassalle, lorsqu’il acheta un exemplaire de l’édition originale du livre « La corne et l’épée ». Une lettre, dans laquelle il est bien entendu question de corrida, corrida à laquelle l’écrivain doit assister. Une course se déroulant à San Sébastian. Dans cette missive, l’écrivain connût aussi pour ses engagements anarchistes et maçonniques, décrit l’ambiance qui entoure ces journées taurines. Après un large tour d’horizon de la personnalité de l’auteur, Jean-Claude Lassalle nous apporte, fort de précieuses recherches effectuées, de nombreuses informations concernant cette lettre. Le conférencier termine sa communication, en abordant la vision tauromachique de Laurent Tailhade, auteur prolixe dans le domaine taurin.

Profitant d’enrichir le sujet, ce numéro 48 de la revue des bibliophiles taurins hexagonaux, propose un texte de Marc Thorel nous offrant une étude des « Taureaux de Tailhade ». Etude relatant la vingtaine de textes ouverts sur la tauromachie, que l’écrivain offrit de son vivant.

Lors de ce IVè colloque, Jean-Louis Rouyre, co-auteur du « Dictionnaire Pertus »*, présenta une communication sous le titre « En marge du Pertus ». L’on y trouve une présentation tauromachique de personnalités ayant écrits ou été plus ou moins intéressés par les taureaux, comme Leicester Hemingway (frère d’Ernest), Paul Reboux, Jules Renard, Paul Guth, et quelques autres. Mais avant tout des personnes dont les écrits et paroles sur le monde taurin, ne feront jamais d’elles des personnalités taurines, donc bien en marges des auteurs référencés dans le « Dictionnaire Pertus ».

« Hugo, Delacroix, et quelques autres contre les corridas, (retour sur une maltraitance intellectuelle) », tel est le titre de la dernière communication de ce VIè colloque de l’U.B.T.F., présentée par Jean-Louis Marc.
Observant la recrudescence médiatique des propos des anti-taurins lors de l’année 2007, le conférencier propose une halte sur les forfaitures intellectuelles que sont la ralliement posthume de plumes comme, entre autre, Victor Hugo. A partir d’écrits d’universitaires abhorrant la tauromachie, le conférencier démontre les manques historiques et littéraires sur les origines des propos présentés comme étant le fruit de l’un des grands noms de la littérature française.

A la vue de ce rapide tour d’horizon des diverses publications reproduites dans ce numéro 48 de la revue interne de l’U.B.T.F., l’aficionado a los toros pourra constater tout l’intérêt que peut lui en apporter la lecture. Même si cette revue n’est publiée qu’envers les membres de l’association, espérons que quelques aficionados a los toros auront la possibilité d’en ouvrir les pages à l'occasion de diverses rencontres.

*Dernière publication de l’Union des Bibliophiles Taurins de France, présentée sur ces colonnes par un article mis en ligne le 04 juin 2009.

dimanche 8 novembre 2009

Un Mazzantini peut en cacher un autre.


Si l’on voulait jouer au jeu de cartes des sept familles, l’on trouverait satisfaction avec le patronyme de Mazzantini. Nous aurions Margaret, écrivaine contemporaine qui reçut en Italie lors de l’année 2002, l’équivalent du prix Goncourt français à savoir le "Premio Strega", avant d’être publiée dans l’hexagone deux ans plus tard. Toujours en Italie et toujours comme contemporain, un dénommé Thomas Mazzantini excelle en qualité d’auteur de plusieurs romanzi fantasy. Il est curieux de noter que comme pour le Mazzantini torero qui nous intéresse et qui était de double origines italo-espagnole, Margaret et Thomas sont les fruits d’amours issus de deux cultures, la première est d’origine italo-irlandaise, et le second italo- suisse.

Dans la "famille" Mazzantini, l’aficionado a los toros trouvera aussi Santos Perice Parilla Mazzantini, matador des années 60-70. Toutefois, le plus connu des Mazzantini reste Don Luis, torero que l’on ne présente plus sur ces colonnes. Mais ce dernier personnage, occulte bien souvent dans l’histoire tauromachique un autre Mazzantini qui se produisit dans les ruedos, à savoir Tomas, son propre frère de sang.
Il faut bien se garder à ne pas confondre Tomas Mazzantini, qui nous intéresse aujourd’hui, avec Tomas Fernandez Alarcón "Mazzantinito" (1879-1916), qui fût lui aussi un excellent banderillero, et dont l’aficionado a los toros français notera qu’il mit entre autre ses qualités au service de Félix Robert à Madrid le 2 mai 1899.

Tomas Mazzantini, est né le 21 décembre 1862, jour symbolique du solstice d’hiver. Il fût considéré comme l’un des meilleurs subalternes de sa génération, L’on notera que Tomas, est lui aussi connu pour être en la calle d’une vêture des plus raffinée, mais à ce jour, personne ne sait lequel influença l’autre. Sa tenue vestimentaire n’a rien à envier à celle de son frère, Tomas est décrit de façon toute aussi élégante.

Toutefois il est dit que c’est en voyant son frère aîné devant les toros que Tomas s’essaya dans les capeas à l’art de Cuchares. Il revêtit pour la première fois le traje de luces en 1882 à Palencia ou Zamora, le quotidien "El Ruedo" ne peut l’affirmer. Il fît ensuite sa présentation à Madrid en qualité de banderillero en 1883, aux ordres de Joaquin Sanz, lors d’une novillada célébrée le 25 février devant du bétail de Carriquiri. Toujours en novillada, à Tarazona au mois d’août de la même année, les reseñas relèvent que le meilleur travail de la tarde fût effectué par Tomas Mazzantini avec ses prestations à la cape comme aux palos. Tomas reçoit sa première cogida sérieuse avec notamment des contusions à la tête, le 17 septembre à Tomelloso.
Tomas Mazzantini fait l’unanimité chez les critiques taurins, mentionné pratiquant le quiebro, et aussi mal los banderilleros, excepto Tomas. Une unanimité qui pousse son frère Luis à lui proposer de le rejoindre dans sa cuadrilla pour la temporada sud-américaine 1883-1884. De l’autre côté de l’océan, le cadet des Mazzantini est fortement apprécié et applaudi.
En 1885, Tomas passe de l’autre côté en prenant les trastos à Madrid, pour une novillada donnée le 8 décembre, avec du bétail de Juan Moreno de Arcos de la Frontera. Mais ensuite il reprend vite sa fonction de banderillero pour une carrière auréolée de succès dans cette fonction.

Il est souvent dit que Lagartijo et Luis Mazzantini, tuèrent beaucoup de toros grâce aux qualités des prestations dans leurs cuadrillas respectives de Juan Molina et de Tomas Mazzantini. L’on trouve trace de Tomas lorsqu’il actua aux côtés de son frère, comme lors de la corrida du 2 août 1885 à San Sébastian où Don Luis s’enferma avec six toros. Il figure aussi au cartel de la corrida inaugurale de la plaza de toros de Murcia, au mois de septembre 1887. La date de la corrida inaugurale de Murcia, nous indique que Tomas était donc aux ordres de son frère en 1887, et qu’il y a de très grandes chances qu’il fût de la campagne taurine cubaine évoquée il y a quelques temps sur ces colonnes, lors de laquelle Sarah Bernhard et son frère qui aurait vécu un amour discret.

Il semblerait que la présence de Tomas dans la cuadrilla de Luis est un peu perturbé quelques historiens peut être pas très au fait de la tauromachie, au point d’attribuer au cadet des actes de l’aîné, comme le financement d’édifices à La Havana. Même si plusieurs documents mentionnent Tomas étant l’initiateur à La Havana, avec Basilio Zarasqueta*, de la construction du fronton de la cité. Ceci semble être tout à fait exact, car il était un fervent supporter de ce sport qu’il affectionnait, et Tomas est présenté comme initiateur du projet et non comme financeur. Mais sa fonction de subalterne, même dans la cuadrilla de son propre frère, ne devait tout de même pas lui assurer des revenus permettant des actes de financement d’infrastructures immobilières comme Jai-Alai à La Havana.

Une confusion à laquelle se rajoute par un exemple de présentation du banderillero, comme étant le famoso torero Tomas Mazzantini y Eguia. Constatant cette confusion, il ne faudrait pas que celle-ci ce soit reproduite envers l’amour supposé en l’actrice française et Don Luis. Même si à ce jour l’histoire attribue à Don Luis la visite dans la loge de l’actrice, le billet qu’il reçu d’elle à son hôtel, le doute peut subsister en filigrane.

Voulant poursuivre au sujet de Tomas Mazzantini, sans vouloir pratiquer de la psychologie de comptoir sur ces colonnes, le poids de l’héritage du patronyme de Mazzantini, devant l’importance de la carrière de Luis, devait être lourd à porter pour Tomas. Et l’on retrouve quelque peu cette idée dans un texte de Rainer Maria Rilke, texte intitulé "La infancia es la patria del nombre".
L’auteur prend l’exemple des frères Mazzantini, et le pouvoir de persuasion que pouvait imposer l’aîné envers Tomas. Lors d’une corrida dont la date et le lieu ne sont pas révélés, le bicho étant en querencia aux tablas, les ordres et conseils de Don Luis envers Tomas capote en main, furent vains. Le diestro constata l’impuissance de son cadet, ce dernier la lui faisant remarquer. Avec cet exemple, beaucoup plus développé dans le texte initial, Rainer Maria Rilke fait le lien avec la situation de rébellion que tout individu peut ressentir vis à vis de la capacité de persuasion développée par autrui.

L’histoire ne dit pas si tel fût le cas de la part de Tomas, même si leurs despedidas respectives datent toutes deux de 1905, mais l’on retrouve ce dernier sans son frère au début du XXè siècle. Cette fois-ci Tomas Mazzantini est en compagnie de Pietro Niembro, alors semble-t-il associés comme contratistas de la plaza de toros de Madrid si l’on en croit Antonio Luis López Martinez, auteur de "Ganaderias de lidia y ganaderos : historia y economia de los toros de lidia". Les deux protagonistes que sont Mazzantini et Niembro, semblent avoir été en cette année 1905, à l’origine d’une initiative peu appréciée du monde ganadero de l’époque, mais qui pourtant faisait suite à des pratiques remontant aux années 1790 avec le marquis Casa de Mesa.
Il était question d’acquérir des toros en Andalousie, qu’ils devaient embarquer depuis Sevilla - Empalme o Salteras, vers San Fernando del Jarama dans la province madrilène à destinations de pulsieurs arènes, et poussant même à voir partir plus au nord quelques bichos. Il semblerait que ce soit pour contrer ce genre d’initiatives de monopôles peu appréciées de l’ensemble des ganaderos, et pour donc pour que les éleveurs puissent contrer le contrôle intenté par les empresas, que ce soit créée la "Unión Nacional de Criadores de Toros de Lidia".

Cette année 1905 est donc celle de sa retirada, tout comme celle de son frère Luis. Après l’association avec Niembro, Tomas Mazzantini se rapproche de la ganaderia de Eduardo Alea, dont il mentionné dans le numéro du quotidien "El Ruedo" en date du 30 octobre 1952, donde apodero la ganaderia de don Eduardo Alea (antes Villamarta).

L’on ne sait pas qu’elles sont les relations des deux frères en dehors des ruedos, ni si Tomas fût franc-maçon comme son illustre aîné ou bien même engagé en politique. Mais ce qui est certain, c’est que entre Tomas Mazzantini et son frère, c’est le cadet qui partira le premier pour l’orient éternel, le 26 octobre 1919 au Puerto de Santa Maria.

*Joueur de pelote basque, promoteur de fronton de La Havana.

mardi 3 novembre 2009

"Arènes sanglantes", premières pages.


L’actualité de ce début d’automne, démontre une nouvelle fois qu’il est bien plus facile de s’en prendre à l’afición a los toros qu’aux réalités sociétales. A Barcelona et dans sa région, se joue actuellement l’avenir taurin, et il est désagréable de constater que les anti-taurins ont plus d'écho que ceux qui se battent pour redonner de la dignité dans les quartiers défavorisés de la ville. Un débat sur les corridas de toros au parlement catalan, qui occulte les conditions de vies insalubres que l’on a pu voir à la télévision française dernièrement, lors d’un reportage sur la ville de Gaudi. En Colombie, une mouvance des contempteurs de l’art de Cuchares qui comptait bien arriver à ses fins, vient de se voir infliger un sacré revers par le Tribunal Constitutionnel, la renvoyant dans ses pénates en ne donnant pas suite à une demande d’interdiction des corridas de toros. Ces actions et situations ne sont pas nouvelles, et l’on constate que parallèlement à cela, des intellectuels ont suivi les pas anti-taurins d’une autre manière.

Nous connaissons Miguel de Unamuno, écrivain et anti-flamenquiste notoire, agissant contre le flamenco et la corrida de toros, membre d’une intelligentsia espagnole qui semblait porter un intérêt pour le peuple, mais qui en fait ne cherchait surtout pas à le côtoyer préférant le voir de loin, d’autant plus si il était Gitan. Unamuno dont le discours de Salamanca ne doit pas faire oublier le parcours parfois contradictoire, saluant en son temps l’avènement de Franco mais aussi se prétendant humaniste tout en voulant poser des interdits pour le peuple parce qu’il n’admettait quelques activités de ce dernier. Mais nous reparlerons prochainement sur ces colonnes de Miguel de Unamuno, car à la lecture du discours de Salamanca, il laisse à penser qu’il est pu être franc-maçon ou bien assez proche de ce mouvement. Contradiction supplémentaire chez cet homme si elle était avérée, puisque par ailleurs favorable à des interdits dénués de sens, mais aussi proche d’une personne comme Eugenio Noel, anti-flamenquiste notoire aux pensées intolérantes.

A l’opposé de Unamuno, nous trouvons Vicente Basco Ibañez (Valencia, Espagne, 1867 – Menton, France, 1928), au parcours très clair vis à vis de la dictature franquiste, et ce dès le début. L’auteur de « Arènes sanglantes » (Sangre y arena), n’est plus à présenter en qualité d’homme de lettres. Peu enclin à la tauromachie, il fût aussi connu pour ses idées révolutionnaires et anti-monarchistes. Et choses que l’on sait un peu moins, il fût initié en franc-maçonnerie. Contrairement à Manuel Azaña, franc-maçon dès 1932, mais dont il semblerait qu’il n’est pas été très présent dans la poursuite des travaux maçonniques, Vicente Blasco Ibañez, lui, paraît avoir été assidu dans son engagement philosophique.
Ce qui nous intéresse ici n’est pas le cheminement maçonnique, même si une loge maçonnique à Valencia porte son nom. Le parcours en franc-maçonnerie de Vicente Blasco Ibañez étant facilement accessible pour qui veut le découvrir, bon nombre de sites internet l’abordent. Mais, comme des cinéastes ou bien des acteurs notamment américains (Laurel et Hardy, Spielberg, …), ont laissé poindre leur intérêt pour la franc-maçonnerie dans quelques unes de leurs réalisations, il paraissait intéressant sur ces colonnes, de percevoir comment l’initiation de Blasco Ibañez au sein de ce courant philosophique, aurait éventuellement influencé l’un des romans qui le rendit célèbre et qui intéresse les aficionados a los toros, à savoir « Arènes sanglantes ». Il n’est pas non plus question de chercher à tout prix des juxtapositions maçonniques et tauromachiques dans ce roman, mais de mettre en évidence certains points qui peuvent laisser penser à une influence, ou bien des clins d’œils placés ici ou là, de son vécu en franc-maçonnerie vis à vis de son œuvre.

Et il n’est pas besoin de lire nombre de pages pour trouver matière au sujet, dès les premières lignes Blasco Ibañez nous présente divers personnages, et, coïncidence ou pas, leurs fonctions dans la société civile offrent un parallèle avec quelques fonctions tenues dans une loge de francs-maçons.
Tout d’abord l’on fait connaissance avec le valet d’épée, Garabato, qui peut être associé dans la description qui en est faite, au « maître des cérémonies ».Le rôle du « maître des cérémonies » est, entre autre, de s’assurer que tous les décors et symboles son présents pour l’application rituélique de la réunion maçonnique. Ici, le mozo nous est présenté comme préparant le traje, aidant son torero à s’habiller. Le valet d’épée donne le rythme de l’habillage du torero, tout comme le « maître des cérémonies » temporise les cérémonies de la loge.
Continuant les premières pages du livre, l’on voit entrer dans la chambre du torero, un personnage venant de Bilbao tenant un feutre cordouan à la main, porteur de nombreuses bagues rutilantes de diamants, symbolisant ainsi l’argent, les finances. Cela n’est pas sans faire songer à la fonction de trésorier d’une loge maçonnique.
L’on fait ensuite connaissance avec un dénommé Docteur Ruiz, médecin des arènes de Madrid. Présenté comme l’homme qui depuis trente ans, soigne tous les toreros écharpés sur la « place » de Madrid. Au sein d’une loge maçonnique l’on retrouve son vis à vis avec « l’hospitalier ». En charge de suivre les « frères » dans le besoin, de s’inquiéter de la santé des membres de la loge mais aussi des personnes qui leurs sont proches. Il est à noter que dans ce passage, l’auteur fait un clin d’œil à ses idéaux sociétaux, le médecin étant qualifié de révolutionnaire rêvant d’un républicanisme anarchiste, où il n’y avait de clair que les négations exterminatrices. Ceci a aussi d’intéressant qu’une catégorie de francs-maçons se disent de mouvance anarchiste, même si cela peut paraître au premier abord paradoxal dans un mouvement codifié, ritualisé, mais qui n’est pas si dénué de sens comme le démontre Léo Campion dans son livre « Le drapeau noir, l’équerre et le compas »*.

La première scène d’habillage du héros que l’on découvre dans le livre, juste avant la corrida madrilène, au moment où Juan Gallardo termine de positionner sa ceinture de soie, l’auteur écrit après de nombreuses haltes, le matador arriva enfin au terme du voyage et eut toute la ceinture de soie enroulée à la taille. Cette phrase apparemment anodine dans le contexte tauromachique, puisque naturellement exécutée par les toreros lors de l’habillage, interroge lorsque l’on sait que Blasco Ibañez fût franc-maçon.
Même si il est facile de faire dire bien des choses à un auteur ou artiste sur l’expression de son travail, et encore plus facilement lorsque ce dernier n’est plus là pour nous contredire, l’on peut penser que dans cette scène, l’auteur est voulu réaliser une métaphore avec les voyages symboliques de l’initiation. Ces voyages allégoriques de l’initiation maçonnique, expliqués par des auteurs comme Oswald Wirth ou Jules Boucher, qui précèdent l’instant où l’impétrant se voit revêtir le tablier d’apprenti. Son nouvel habit avec lequel il pourra désormais accomplir le rite, tout comme le torero revêt le traje de luce afin d’accomplir son rite. Il est intéressant de noter que l’allusion aux voyages est faite dès le début du livre, laissant ainsi à penser que si l’auteur a voulu planter un décor maçonnique dans son œuvre, il le fait dans l’ordre chronologique des choses.

Une autre métaphore est employée par Blasco Ibañez, lorsque Gallardo est décrit habillé et fendant la foule pour se rendre vers la calèche qui doit le mener aux arènes. L’auteur exprime que habillé de la sorte, le torero est un autre homme, un homme nouveau. Cela fait songer à ce qui est exprimé à propos de l’homme nouveau qu’est le franc-maçon nouvellement initié, porteur des attributs symboliques que sont le tablier et les gants. Ici aussi cette allusion est présentée au début du récit, comme si cette première scène de l’habillage de Juan Gallardo, permettait au lecteur d’assister à son initiation tauromachique afin de poursuivre l’histoire du torero.

Les premières pages du livre nous invitent à faire connaissance avec des personnages qui ne sont pas anodins, puisque ils occupent des places importantes dans la société mais aussi dans la vie du torero. Ces fonctions, et pas des moindres, que l’on retrouve dans la conception d’une loge maçonnique. Ensuite viennent les allusions aux voyages symboliques, ainsi que l’apparition d’un homme nouveau après l’habillage. Pour qui prête un peu attention aux pensées pouvant être exprimées en filigrane dans un texte, il est à espérer que la poursuite de la lecture de ce classique de la littérature, offre encore quelques matières à juxtaposer avec la passion des toros.

(A suivre)…



*« Le drapeau noir, l’équerre et le compas » de Léo Campion, Éditions Alternatives Libertaires, 2004. Réimpression sous forme de brochure de l’édition de 1997 éditée par la Maison de la Solidarité et de la Fraternité et les éditions Alternatives Libertaires, tirage aujourd’hui épuisé. La première édition date de 1969, sous le titre « Les anarchistes dans la franc-maçonnerie ou Les Maillons Libertaires de la Chaîne d’Union » aux éditions Culture et Liberté. En 1978, ce livre fût publié pour tout public sous le titre qu’on lui connaît, aux éditions Goutal-Darly.

mardi 27 octobre 2009

Le matador et la diva.


Il est des sujets pour lesquels l’on porte un certain intérêt, et dont l’origine de l’attrait est parfois des plus surprenante. Même si l’afición a los toros est née dès l’enfance, il est courant bien des années plus tard, de faire des découvertes permettant la poursuite du cheminement sur la terre des toros. Cette terre taurine, indissociable de la terre des hommes, cette culture taurine, inséparable de la culture Humaine, et ce depuis des siècles.
Les avis étant subjectifs, chacun et chacune aura une représentation bien personnelle de cette alliance taurino-humaine. En général, il s’agit d’un torero, dont les prestations dans les ruedos mais aussi en la calle, rassemblent l’idée même que l’on se fait de la vie et de la corrida de toros. Je ne peux cacher que parmi les toreros contemporains, Francisco Rivera « Paquirri », Christian Montcouquiol « Niméño II » et Victor Mendes ont marqué mon afición. Au début du XXè siècle, c’est José Gomèz « Josélito », qui paraît le plus représenter mon idéal taurin, de par sa conception de la tauromachie*. Mais si il est un torero pour lequel mon intérêt est grand et ce pour diverses raisons, il s’agit bien de Luis Mazzantini.

Déjà évoqué sur ces colonnes à quelques reprises, je ne peux m’empêcher d’aborder une nouvelle fois ce matador, mais non pas sous son passé de franc-maçon comme réalisé dernièrement. Cette fois-ci il s’agit d’un article lu il y a plus de 18 mois, signé de Manuel Henríquez Lagarde, et intitulé El matador y la diva.
Même si il est certain que les amants furent discrets sur leurs amours, et que dans pareils cas l’on ne peut pas empêcher la rumeur de s’établir ainsi que les idées les plus folles, ce texte cubain comme d’autres, renseigne l’aficionado sur quelques points. Des points, des pierres, de l’édifice taurin qui peuvent paraître anodins, mais qui mis bout à bout avec patience, permettent de construire le puzzle d’une certaine époque tauromachique.

L’on passera aisément sur la façon décrite de manière quelque peu romancée, dont la diva et le matador ont été respectivement accueillis en terres cubaines. Par contre, l’on retrouve une fois de plus les accointances entre Don Luis et l’aristocratie, où le maestro rencontre entre autre la comtesse Fernandina. Mais il est dit aussi que c’est Luis Mazzantini acteur qui conquis d’abord la société havanaise, lors d’une représentation théâtrale au bénéfice du collège des petites filles de Jésus del Monte. Il joua dans une œuvre de Julian Casal, intitulée Echar la nave.

Luis Mazzantini tomba d’admiration pour Sarah Bernhardt, au point, un soir de représentation, de se diriger vers sa loge, accompagné par deux hommes de sa cuadrilla, à savoir Diego Cuatro Debos y Babila. Mais la rencontre fût des plus furtives, à peine quelques mots échangés de manière très brève, un dénommé Marty Gutiérez faisant barrage devant la loge.

Concernant le premier nommé des hommes accompagnant Don Luis, il semble s’agir plus exactement de Diego Prieto Barrera « Cuatro-Dedos ». Il est écrit dans l’hebdomadaire taurin « El Ruedo » en date du 23 octobre 1952, que don Diego est né à Coria del Rio (Sevilla) le 15 janvier 1858, alors que le « Cossio » donne comme date de naissance le 28 janvier 1856, et qu’il décéda à Mejico le 16 février 1918. Diego Prieto Barrera torea avec bon nombre de figuras. L’on retrouve aussi Diego Prieto en compagnie de Tomas Mazzantini, frère de Luis, en 1884. Apprécié aux Amériques, Don Diego, matador de toros de second plan en Espagne, est défini comme un torero bon muletero et estoqueador. Il semblerait donc que « Cuatro-Dedos » ne fût pas présent à La Havana en tant que membre de la cuadrilla mazzantinienne, mais en qualité de matador. Ce que semble confirmer la suite de la lecture du texte initial, puisqu’il y est dit que lors de la corrida du 23 janvier 1888, en la plaza de toros cubaine de Belascoaín, les deux premiers bichos furent facilement dominés par Mazzantini et « Cuatro-Dedos ».

Luis Mazzantini, qui réussit involontairement à répandre sa mode vestimentaire à la haute société havanaise, ne remplit pas les arènes malgré sa présence au cartel lors de cette journée de janvier. Ce fût même une course où le diestro parût couard à quelques reprises, pour se reprendre par la suite. L’on apprend aussi lors de la tarde cubaine, que le castoreño nommé Cantares, fût malmené par le troisième toro de la tarde, qui échut à Don Luis. Malmené le picador, au point de voir son maestro venir au quite. Les corridas cubaines étaient avec piques et mises à mort.

A l’issue de la corrida à laquelle Luis Mazzantini venait de participer dans un costume vert et argent, et lors de laquelle il s’était permis de poser une paire de banderilles, le maestro rentra à l’hôtel d’Angleterre, qui s’enorgueillit encore de nos jours d’avoir reçu Luis Mazzantini et Sarah Bernhardt en ses murs. La, un garçon l’attendait avec une carte sur laquelle il était noté que les mots entendus dans la loge étaient insuffisants. C’est alors que Don Luis alla à « l’hôtel Petit » où était logée l’actrice.

La légende qui semble s’être construite autour de cet amour entre le torero et l’actrice française, amène à évoquer des faits qui paraissent très surprenants. Comme par exemple dans ce texte de Manuel Henríquez Lagarde, où il est évoqué une scène quelque peu intrigante.
Invité à entrer dans la chambre de l’actrice, Don Luis se déshabille et se couche dans le cercueil qui, d’après les dires, accompagne toujours « La voix d’or », et l’invite à le rejoindre. Ainsi couchés dans les bras l’un de l’autre, Sarah Bernhardt lança tu vois, c’est le monde, l’amour, toutes les grandes choses, une ligne simple, une limite imperceptible entre la vie et la mort. Les amants s’embrassèrent, au milieu des cris des animaux qui accompagnaient l’actrice et logeaient eux-aussi dans sa chambre.

Nous laisserons aux lecteurs et lectrices de ces colonnes, le soin d’apporter l’intérêt qu’il ou elle jugera utile à cette dernière scène, incongrue et totalement décalée vis à vis de l’image que l’on peut avoir notamment du torero. Mais il est à souligner que même si l’imagination de l’auteur initial du texte semble ici débordante, une photographie parue en 1903 dans un magazine américain, représente l’actrice se reposant dans sa maison et dans un cercueil. Sarah, qui a l’âge de 15 ans, déjà excentrique et morbide, faisait la sieste dans le cercueil qu’elle s’était acheté.

Une semaine après la naissance de cet amour et la corrida de la plaza de Belacoaín, le périodique La voz de Cuba, informe du déroulement de la corrida a puerta cerrada, que Luis Mazzantini donna en l’honneur de Sarah Bernhardt. Et le journaliste de la voix de Cuba de conclure son article de 1888, ved aquí los frutos de la estrecha alianza y de la íntima unión entre una ilustre trágica francesa y un matador de toros español.


* L’on peut lire à ce sujet l’excellent livre de Joël Bartolotti intitulé « Gallito, matador de toros, de l’enfant roi au Dieu mortel » (Editions UBTF, 1997).

mardi 20 octobre 2009

José Manzano y Pelayo "El Nili".


Parmi les quelques noms de toreros qui furent francs-maçons, l’on peut mentionner celui de José Manzano y Pelayo, connut dans les ruedos sous l’apodo de « El Nili ». Comme pour bon nombre de ses coreligionnaires, nous n’avons pas traces précises des activités maçonniques de « El Nili », mais son état d’initié aux mystères et privilèges de la franc-maçonnerie, est rapporté dans quelques textes de la façon suivante, el dia 1.° noviembre de 1869 falleció en Sevilla, costeando su entierro los hermanos de la escuadra y del compás, pues ya he dicho que fué francmasón.

C’est dans ce même texte de Don Ventura, relatant brièvement la carrière taurine de El Nili, que l’auteur ironise quelque peu, en précisant que le fait d’avoir été franc-maçon n’a pas empêché José Manzano y Pelayo d’être un bon torero, et qu’être membre d’une loge maçonnique ne semble pas avoir annulé ses qualités de liliador. Bernardo Casielles Puerta, Luis Mazzantini et dans un autre registre « Cantinflas », démontrent en effet qu’être franc-maçon n’est pas incompatible avec les métiers des arènes, ni par ailleurs avec d’autres activités.

Si l’on osait, l’on pourrait coller à la mode de voir du symbolisme maçonnique partout, et dire que El Nili était prédestiné à entrer en franc-maçonnerie, puisque né en 1828, un 7 janvier. Le chiffre 7, combien important dans la symbolique maçonnique. Mais laissons ces élucubrations aux « journaux » adeptes des marronniers, et regardons de plus près la carrière de José Manzano y Pelayo « El Nili ».

En 1851 il est banderillero dans la cuadrilla de Manuel Trigo, et ensuite le 15 août 1857, c’est sa première apparition à Sevilla, sa ville natale. Durant les années 1857 et 1858, il alterne avec entre autre Cuchares, Cayetano, El Tato. Lors de son ultime corrida à Jaén le 15 août 1869, il était au cartel avec Lagartijo. Entre temps, il prît l’alternative a Granada le 15juin 1857, des mains des « El Gordito ».

Deux traits de caractères de José Manzano y Pelayo nous intéressent ici, car ils semblent bien en adéquation avec une initiation en franc-maçonnerie. Le premier étant celui de posséder un caractère indépendant, caractère qui l’a maintenu dans un certain isolement taurin. Cela peut paraître paradoxal d’être franc-maçon, d’appartenir à un groupe dont la fraternité est essentielle, et aimer être indépendant. Mais à bien y regarder, l’on trouve dans la conception même de la franc-maçonnerie, une démarche d’indépendance, aussi bien au niveau de la connaissance de soi que de la somme de travail à réaliser pour l’amélioration de l’Etre. Toutes ces démarches, dans quelques domaines qu’elles soient, ne sont que les fruits d’un travail individuel, réalisé par le seul intérêt porté au cheminement vers la quête, en totale indépendance justement. De plus, l’indépendance est souvent associée à l’esprit libertaire, et quelques spécialistes mais aussi des francs-maçons eux-mêmes, trouvent et ressentent une essence libertaire dans cette association philosophique. Comme l’a précisé entre autre Léo Campion, la vocation libertaire de la maçonnerie est indéniable. Il semblerait que le fonctionnement au sein des loges maçonniques ait séduit Campion, mais aussi Michel Bakounine, les trois frères Reclus (Élie, Élisée et Paul), Proudhon, Giuseppe Mazzini (qui proclama la République à Rome en 1848), et bien d’autres esprits indépendants.
Il est à noter que ce caractère indépendant prêté à José Manzano y Pelayo « El Nili », l’isola de la majeure partie du monde taurin, malgré qu’il fût un excellent torero, fin et classique. Il connaissait bien les secrets de sa profession. Le « Cossio » rapporte que ses contrats auraient été bien plus nombreux, si il avait été plus discret et discipliné dans l’arènes comme dans la rue. Discipliné dans l’arène, sûrement en rapport avec son grand manque de régularité dans la suerte suprême. Car il est connu que « El Nili » n’excellait absolument pas avec l’acier. Des échecs que le « Cossio » attribut à son caractère individualiste, admettant à grand-peine les leçons de ses confrères.

L’on peut s’interroger sur le pourquoi de cette notification du « Cossio » a propos du comportement dans la rue, à savoir le comportement sociétal, de notre torero. C’est ici que l’on retrouve le second trait de caractère de ce torero franc-maçon. Un engagement pour des valeurs, et notamment son engagement à Madrid auprès des chefs de la « Révolución de septiembre ». Comme on le sait, les toreros qui furent francs-maçons eurent des engagements sociétaux très forts. Casielles Puerta s’engagea aux côtés des Républicains pendant la guerre d’Espagne, Luis Mazzantini fût entre autre élu politique, et « Cantinflas » oeuvra énormément et le plus souvent dans l’ombre pour les plus démunies de ses compatriotes au point de ce voir proposer des hautes fonctions qu’il refusa.
Concernant « El Nili », être franc-maçon à cette époque des premières fortes implications des loges ibériques dans la société, associé à son fort caractère, ne pouvait que l’inciter à prendre une place au sein de « La septembrina ». A quel degré fût cet engagement, pour l’instant nous n’en savons rien, mais suffisamment important pour que le monde taurin l’isole. Il ne faut pas oublier que la première période de la franc-maçonnerie espagnole s’étend de 1800 à 1868, et que cette dernière était considérée comme hors la loi pendant les années 1833-1843 et ses membres étaient persécutés comme ils le seront aussi un siècle plus tard. Des gouvernements qui interdisent, un régime religieux qui s’associe à l’interdiction, il n’en faut pas plus pour marquer la conscience du peuple.

« El Nili » fût donc membre assez jeune de la franc-maçonnerie, puisque décédé à 41ans. L’on sait à la lecture de tableaux de loges ibériques, que cela n’était pas un cas isolé, alors qu’à notre époque, la moyenne d’âge est plus élevée et que la quarantaine est la tranche d’âge des postulants. La jeunesse et le tempérament de José Manzano y Pelayo « El Nili », l’ont probablement incité à prendre une place active dans sa loge.

Quoi qu’il en soit, José Manzano y Pelayo « El Nili » est le premier dans la chronologie des toreros francs-maçons connus à ce jour. L’histoire taurine n’a pas certes pas retenu son nom comme elle a pu le faire pour d’autres. L’on retient de nos jours son caractère indépendant, mais il a été fidèle à lui-même, sans se renier, passant au delà des déboires que cela lui apportait, un comportement comme cela doit et devrait l’être pour tout franc-maçon, mais aussi un véritable comportement de Torero.

jeudi 15 octobre 2009

Luis Mazzantini y Cuba


Il est des moments, où le travail de recherche nous mène à la découverte de choses inattendues. Cela s’est produit lors de la lecture d’un livre de Michel del Castillo, qui permit, même si ce n’était pas l’objet initial de la lecture, d’entamer par la suite de petites recherches à propos de Melchor Rodriguez ancien novillero et militant anarchiste. Ou bien au sujet de « Cantinflas », torero comique, acteur rival de Charlie Chaplin que ce dernier qualifiait de plus grand, et aussi franc-maçon. Mais encore, Bernardo Casielles Puerta, torero, franc-maçon et combattant républicain. Tout ceci fût déjà mentionné lors d’articles précédents sur ces colonnes, mais il fût aussi abordé ce court plaisir de croire un instant, avoir trouvé une piste vis à vis de l’impact de la mort en France de Espartéro. Plaisir éphémère, sur le seul fait de la lecture d’archives de la franc-maçonnerie espagnole, comme déjà raconté ici-même.

Mais parmi les acteurs taurins qui nous intéressent sur ce blog, bien entendu nous trouvons Luis Mazzantini. Torero que l’on ne présente plus aux aficionados, initiateur du sorteo, spécialiste de l’estocade a volapié, commissaire de police, responsable ferroviaire, un temps chanteur d’opéra, ou encore élu politique et franc-maçon. De Luis Mazzantini, autant sa carrière de matador est plus moins connue des aficionados et son activité de franc-maçon l’est beaucoup moins, autant il est souvent mentionné ses prétendues aventures sentimentales, notamment avec l’actrice Sarah Bernhardt,

A ce sujet, le site internet de « Habana Radio, émisora de la Oficina del Historiador de la Ciudad de la Habana », rapporte un article de Miguel Ernesto Gómez Masjuán en date du 14 décembre 2007, qui aborde rapidement la rencontre entre le matador et la diva. Leurs yeux se seraient croisés lors d’une vuelta du torero à l’issue de l’une de ses corridas cubaines, et plus précisément en cette année 1886. La romance veut que ce simple regard est captivé les futurs amants. Une romance qui va pousser le Don Luis à offrir une corrida a puerta cerrada, pour le seul plaisir de l’actrice. C’est du moins ce que rapporte l’auteur de la chronique, d’après un article de l’époque publié dans un journal français, « Le Figaro ».

Mais cette romance entre les deux célébrités d’alors, car il semblerait qu’ils n’ont pas été avérés par les intéressés eux-mêmes, ne sont bien entendu pas vérifiables. Par contre, ce qui est certain, c’est que Luis Mazzantini a marqué de son empreinte l’île cubaine, même et surtout au delà de l’afición. Torero de grande notoriété, cette dernière du fait de ses prestations dans les ruedos, mais aussi de par son parcours atypique avant d’en venir aux toros, Luis Mazzantini n’était en aucun cas la représentation parfaite de l’image du matador à cette époque. Atypique, il continua à l’être lorsqu’il se coupa la coleta, en embrassant une carrière politique, carrière désirée bien avant sa retraite taurine. Rares furent les toreros d’alors à s’impliquer avec une telle notoriété dans la vie de la cité. Bien entendu, il y eut des cas comme Melchior Rodriguez ou bien quelques autres, mais l’ensemble de ces matadors n’eurent pas la carrière taurine de Luis Mazzantini.

A Cuba, ce qui attire aussi l’attention vis à vis de Luis Mazzantini, c’est le financement par le torero de la construction du « Palais des cris » de la Havane. Ceci pouvant paraître surprenant. Mais au moment ou des obédiences maçonnique locales comme la « Gran Logia de la Isla Cubana » en 1880, s’occupaient tout d’abord à faire vivre trois écoles publiques, il se pourrait que des besoins pressants d’infrastructures aient été pointés. Don Luis n’était pas encore un homme politique, mais son envie d’embrasser une telle carrière était pourtant présente bien avant sa retraite des ruedos. En homme se voulant à l’écoute des besoins des autres, mais aussi ses relations avec des personnalités politiques comme des arts à l’époque, pourraient avoir inciter un tel geste. De plus, son activité maçonnique était forcément connue. Ces détracteurs savouraient un anti-maçonnisme primaire, se servant du fait qu’il soit initié pour faire valoir des prétendus passes droits afin d’avoir des contrats comme les corridas parisiennes de la rue Pergolèse, ou bien l’inauguration des arènes d’Oran. Des francs-maçons biterrois étaient aussi au courant de l’activité fraternelle de Don Luis, au point de la recevoir dans une loge de Béziers en 1882. Alors que dire des frères cubains, très impliqués dans la vie politique de l’époque, tout comme l’était le torero au point de rencontrer des hommes de pouvoir tels que William Jennings Bryan.

Ces point ont été soulevés dans « L’équerre, le compas, les toros », toutefois les recherches en ce domaine sont encore difficiles. Mais ce qui pourrait être rajouté, c’est qu’en homme de bonne volonté, le rapprochement avec son confrère et néanmoins rival Ponciano Diáz le prouve, Don Luis était peut être sensible à une sorte de diplomatie voulant apaiser les relations tendues alors entre Cuba et l’Espagne. Il ne faut pas oublier que la crise économique de 1866-1867, avait fait naître les premiers sentiments d’indépendance vis à vis de la couronne ibérique, et Luis Mazzantini n’était pas insensible notamment au roi Alfonso XIII. Quel meilleur « ambassadeur » qu’un torero célèbre, connaissant et pratiquant les codes de la « bonne société » mais aussi de la politique, de plus franc-maçon, pouvait se faire l’écho du soucis de l’Espagne envers cette terre de l’autre côté de l’océan ? Une terre où justement la franc-maçonnerie était bien présente depuis la fin du XVIII è siécle et plus précisément implanté à partir de 1804 grâce à un français, Jospeh Cerneau. Une franc-maçonnerie inquiétée par des premières persécutions lors de la crise des années 60, mais aussi quelque peu impliquée dès les prémices des désirs d’indépendance issues de cette époque. Une franc-maçonnerie, aussi partie prenante dans la création du « Parti Révolutionnaire Cubain ».

Le souvenir laissé par Luis Mazzantini en terres cubaines, pourrait ne pas être le seul fruit d’une supposée aventure amoureuse avec l’actrice française, ni de ses prestations tauromachiques. Ce point nous intrigue depuis déjà quelques temps, espérons qu’un jour prochain la lumière se fera sur cette part de la vie de Luis Mazzantini, franc-maçon et torero atypique.

mardi 6 octobre 2009

Qui et combien ?


Les deux sujets communément traités sur ces colonnes, et qui font l’intérêt, à la vue du nombre régulier de visiteurs, de ce blog atypique qui semble être unique en son genre, appellent à de multiples interrogations. Des interrogations initiées il y a déjà presque une quinzaine d’année, lorsque la curiosité poussa à porter un regard plus soutenu sur le mouvement philosophique qui nous intéresse principalement ici, et nous montra que en quelques domaines, il y a avait des accointances avec la tauromachie. A mesure des recherches et investigations, l’on arrive, même si l’on est qu’un modeste amateur, à dénicher des informations qui enlèvent certains doutes, mais d’autres informations qui aussi rajoutent des interrogations.

Et parmi ces nombreux questionnements, il en est un revenant fréquemment, qui est de savoir qui et combien de personnalités plus ou moins connues du mundillo, auraient pu être, voire ont été, membres de la franc-maçonnerie. Il n’est pas question ici de singer cette « presse » plus adepte du racolage que de la véritable information, et qui nous ressasse à intervalles réguliers les mêmes fantasmes de complots, pouvoirs, et autres ramifications supposées, jusqu’à parfois des liens imaginaires et surtout non vérifiés, avec le Prieuré de Sion voire l’affaire du trésor présumé de Rennes le Château*. Ces choses qui pourraient être risibles, mais qui en fait, attristent à l’idée qu’elles ne font que perdurer des idées reçues, que tout le monde sait n’être que le fruit de mauvaises intentions. Il n’est donc pas question de cela sur ces colonnes, et si l’interrogation sur qui et combien d’acteurs taurins ont été franc-maçons est toutefois bien la, c’est que pour l’aficionado a los toros véritablement passionné, il est des réponses pouvant être ainsi apportées notamment vis à vis de quelques acteurs taurins.

Mais outre les noms de toreros dont l’on sait qu’ils furent franc-maçons, comme Bernardo Casielles Puerta, « Cantinflas », Luis Mazzantini, il serait intéressant de savoir si d’autres acteurs, n’auraient pas eu les deux centres d’intérêts. Les informations étant assez difficiles à acquérir, notamment parce que la dernière dictature espagnole fît disparaître beaucoup de documents, et qu’il fût préférable aux franc-maçons de ne pas se faire connaître, ceci malgré que Franco était lui-même fils et frère de franc-maçon, quelques interrogations ne trouvent donc que des réponses supposées. A regarder l’histoire de la franc-maçonnerie espagnole, l’on constate des patronymes qui existent aussi dans le monde taurin. Comme entre autre Urquijo. Mais n’ayant à ce jour aucune information plus précise, malgré les investigations, qui espérons le, porterons leurs fruits assez rapidement, intéressons nous le temps d’un article à un autre domaine. A savoir la possibilité de franc-maçons impliqués dans la construction des arènes de Las Ventas.

Soyons honnêtes dès maintenant, il n’y a aucune réponse ferme et définitive à ce jour, tout n’est de l’ordre de la supposition. Mais à lire l’étude de Olivia Salmon Monviola intitulée « Une frontière dans la ville : les franc-maçons dans la ville de Madrid (1900-1936)** », l’on peut laisser aller l’imagination.

L’actuelle plaza de toros de Las Ventas à Madrid, située calle Alcalá, fût inaugurée le 21 octobre 1931. Nous sommes donc en pleine période étudiée par Olivia Salmon Monviola. Et à ce moment la, il est intéressant de noter que c’était sur la calle Alcalá qu’était situé le Café de Madrid qui était le point de rencontre des créateurs de la génération de 98 , mais aussi l’un des lieux emblématiques de la sociabilité culturelle madrilène, à savoir le Café del Gato Negro. Dans les cafés justement, se déroulaient les tertulias, tout comme aussi dans les rédactions des journaux. Ces rencontres principalement d’intellectuels, étaient informelles et quotidiennes, composantes d’un ensemble de sociabilité propre à la capitale ibérique. Mais la calle Alcalá, c’était aussi à ce moment là, le cœur du triangle financier de la capitale, des activités économiques mais aussi politiques.

La franc-maçonnerie madrilène était composée de 37 loges, ainsi que de 3 chapitres philosophiques, qui sont des ateliers dits de « hauts grades » ou bien de « perfectionnements ». Ce chiffre de 37 loges, est, comme le précise l’auteure de l’étude, basé sur le nombre de lettres patentes pour chacune des obédiences présentes. Entre 1931 et 1936, c’est la Gran Logia Española qui connaît le plus grand essor dans la capitale, avec pas moins de 15 loges crées. Et c’est au 171 de la calle Alcalá, que s’installèrent les loges maçonniques de cette obédience.

Comme les loges maçonniques, sont le reflet des micros sociétés qui évoluent à l’intérieur de sociétés englobantes plus complexes, la géographie dans laquelle elles se développent, est, pour Olivia Salmon Monviola, une interaction des loges avec l’espace de sociabilité. Il semblerait donc qu’à cette époque, l’implantation des loges maçonniques, influe sur le tissus sociétal du quartier où elles se situent. Ces implantations dans des endroits à fortes concentrations humaines, proches des lieux des fréquentations familières aux madrilènes, facilitaient entre autre la pérennité des loges, par une facilité d’accès à la franc-maçonnerie pour toute une couche sociale.

A regarder avec attention le tableau des différentes catégories socioprofessionnelles qui composaient les loges maçonniques madrilènes de l’époque, l’on constate que outre les employés et fonctionnaires représentant 32% des franc-maçons, les gens du commerce et de l’industrie étaient au nombre de 13%, et les artisans représentaient 10% de la composante des loges. Au fait que l’implantation d’une loge d’alors, n’est pas étrangère à la catégorie socioprofessionnelle qui la compose, comme cela fût constaté à plusieurs reprises, comme des salariés des hôtels Ritz et Palace, dans une loge située à proximité, ou alors des acteurs et artistes membres de la loge « Hispanoaméricana » proche elle des théâtres, l’on est en droit de s’interroger concernant les métiers liés au bâtiment qui ont œuvrés lors de la construction de la plaza de toros. Surtout que la présence de la Gran Logia Española sur la rue Alcalá, et les deux exemples cités précédemment, n’interdisent pas l’idée même que des membres des différents corps de métiers aient été initiés à l’occasion de leurs présences sur le chantier du temple taurin madrilène.

Tout d’abord l’on pourrait regarder du côté des architectes, catégorie professionnelle étant comptée dans les professions qualifiées au nombre de presque 16%. Mais l’on ne sait pas encore si José Espeliú était franc-maçon. Les artisans, les différents corps de métiers du bâtiment, étaient sûrement représentés parmi les 10% d’artisans répertoriés et composants les franc-maçons de la capitale. Travaillant à la construction des arènes calle Alcalá, l’une des principales obédiences maçonniques espagnoles étant présente dans la même rue, la durée totale du chantier a probablement amené les uns à rencontrer les autres. D’autant plus que l’admission de franc-maçons artisans ne semble pas avoir été du simple fait des patrons, mais aussi des acteurs de petits commerces. Et lorsque l’on sait qu’une partie de la franc-maçonnerie ibérique était très tôt favorable au dialogue social, à la mixité sociétale, à l’esprit de laïcité développé par leurs frères hexagonaux, l’on peut se plaire à penser que même des ouvriers ont pu être amené à connaître l’initiation maçonnique. Surtout que cette classe sociale, des ouvriers, était quand même de l’ordre de un peu plus de 6%, ce qui pour un mouvement intellectuel, à connotation, il faut tout de même le reconnaître, élitiste sur le plan intellectuel, n’est pas négligeable.

Comme précisé plus en amont de ce texte, rien ne permet d’affirmer que des franc-maçons furent impliqués dans l’édification de la plaza de toros de Las Ventas, mais la lecture de l’étude de Olivia Salmon Monviola, n’interdit pas cette éventualité. A bien y regarder, elle la renforce même.



*Pour les lecteurs et lectrices intéressés, on ne saurait trop recommander « Rennes le Château, une affaire paradoxale » de Laurent Buchholtzer (Editions de l’œil du Sphinx, 2008). ISBN 2-914405-45-6. Cet ouvrage apporte une autre vision sur la légende du supposé trésor de l’abbé Saunières, mais aussi remet à sa juste place le mythe du Prieuré de Sion.

**« Une frontière dans la ville : les franc-maçons dans la ville de Madrid (1900-1936) » par Olivia Salmon Monviola, Cahiers de la Méditerranée, volume 73-2006.

samedi 26 septembre 2009

Hymnes.


Cet été, lors de la visite des novillos aux corales des arènes de Parentis en Born, la veille de la première novillada du cycle, une discussion très intéressante fût engagée avec un ami aficionado de verdad que j’avais grand plaisir à retrouver. Notre échange se fît non seulement sur les bichos présents, mais surtout sur l’aspect philosophique et sociétal de la tauromachie.

Nous étions tout deux d’accord sur le fait qu’étant donné l’évolution du débat sur la corrida, cette dernière ne peut être principalement défendue que sur un plan philosophique, et que même si « la philosophie est une pierre insoluble dans le jardin des cons » comme l’a dit récemment Raphaël Enthoven sur les ondes de France-Culture, c’est sous cet angle la qu’il faut aborder le sujet. De plus, traiter philosophiquement de la corrida, c’est aussi se positionner sur le même terrain que les contempteurs taurins, qui de par leur anthropomorphisme et anti-spécisme revendicatif, veulent interroger la société sur ce plan. Nous sommes donc à armes égales, et ainsi nous ne leur laissons pas le champ libre dans la propagation de leurs inepties à notre encontre.

Mais aborder la tauromachie sous son aspect philosophique, symbolique, rituélique, ne doit pas aussi occulter l’orientation sociétale qu’elle prend depuis quelques années, et ceci renforcé par la crainte plus ou moins forte, de la voir à terme disparaître. Bien entendu, la corrida a toujours évolué avec la société, elle est à son image avec ces différentes composantes que l’on retrouve dans toutes les sphères de notre quotidien. Avec un public se rendant aux arènes sans être particulièrement aficionado a los toros, un public de véritables passionnés, mais aussi des décideurs taurins voulant faire croire que c’est le public qui demande tel type de tauromachie, alors que ce sont eux qui proposent une seule dominante dans les genres de corridas présentées.

Sans vouloir entrer dans un débat politique qui n’aurait pas sa place ici, s’intéresser à la tauromachie et à tout ce qui l’entoure, des arts à l’histoire, ne peut effacer ses propres prédispositions sociétales. Et être intéressé par la corrida de toros ainsi que par des mouvements intellectuels qui partagent certains idéaux tel que la laïcité, ne peut atténuer ses sensibilités en quelques occasions.

Pour un Républicain Laïque, ancien militant de terrain mais toujours viscéralement attaché à ces valeurs, il est parfois inconfortable d’entendre de fortes revendications régionales en étant sur les tendidos. Entendons nous bien, ceux ou celles qui me connaissent et avec qui nous avons eu l’occasion d’échanger sur ce sujet peuvent en témoigner, il n’est pas question de prôner un anti-régionalisme, je suis attaché à la région qui m’a vu naître, et encore plus étant en exil. Mais tout en étant éloigné des terres familiales, l’on rencontre aussi des personnes attachées à leur terre différente de la notre. Et l’on s’aperçoit que si l’on allait vers ce que désirent certains mouvements régionaux, l’on aurait plus qu’à rebrousser chemin, ou bien à gommer sa particularité pour entrer dans le moule régional formaté, à savoir notamment parler la langue ne serait-ce pour pouvoir comprendre un contrat de travail que d’aucuns voudraient bilingues, en attendant qu’il ne soit rédigé la seule langue de la région. Sujet sensible que les langues régionales, mais dont il ne faut pas oublier que ces dernières sont le résultat de l’uniformisation d’une multitude de dialectes locaux, réalisée par des intellectuels régionaux ayant décidés pour les autres. Ce qui a été reproché, et parfois à juste titre, à la République, a été pratiqué par ceux qui la conspuaient.

Entendre des hymnes ou autres chants régionaux sur les tendidos, ne poseraient pas de problèmes pour quelques uns d’entre nous plus nombreux qu’on ne le croit, si toutefois il y avait une égalité parfaite dans leurs applications. Non pas à propos de la querelle annuelle entre le Coupo Santo et le Se Canto, comme cela s’entend à Béziers, mais une égalité comme on la constate lors de rencontres sportives notamment. A savoir que l’hymne des chaque pays est joué, par soucis d’égalité. Si un jour cela ne se faisait pas, l’on frôlerait l’incident diplomatique. Même si la corrida de toros est originaire du pays de Cervantes, nous sommes à ce jour des citoyens de la République française. Aussi pourquoi ne pas jouer La Marseillaise avant ou après, peu importe, l’hymne régional ? Ce qui frôlerait l’incident diplomatique dans n’importe quel contexte, ne choque pas grand monde sur les tendidos.

Il est évident que derrière l’attachement à ces hymnes régionaux, locaux, l’on rencontre de multiples revendications. Allant des revendications fortement régionales, jusqu’au simple fait de vibrer pour la beauté du chant repris en cœurs dans l’enceinte sacrée de notre passion. Mais afin de pouvoir laisser à tout un chacun la libre expression de ses sensibilités à l’écoute d’un hymne régional, il faudrait penser à le positionner sur un plan égalitaire. Ce serait appliquer le principe de Laïcité, garant du vivre ensemble, et qui n’est pas exclusivement à connotations religieuses, comme ce m’éprennent trop souvent ceux et celles qui n’en connaissent pas bien au moins le sens.

Une interrogation se fait tout de même grandissante, à mesure que de tels chants sont repris dans quelques arènes. Quel sens ont-ils au regard, plutôt à l’écoute, de la majorité du public ? Il y a ceux pour qui il s’agit d’un attachement à la région, c’est entendu, respectable et très clairs. Mais il y a aussi, et il est à craindre que ce soit pour une large majorité, une forme d’action contre les attaques des anti-taurins, voulant ainsi marquer une empreinte locale à notre passion. S’associant ainsi à un idéal qu’ils méconnaissent voire ne partagent pas par ailleurs, ils veulent faire front commun, adhérant de la sorte au principe de la démocratie pacifique qui s’instaure de plus en plus chaque jours. Espérons que la démarche est sincère, et que derrière ces chants, au demeurant très beaux, il n’y est pas une orchestration, afin d’orienter une partie majoritaire d’un public, comme le fait de vendre un accoutrement uniforme*, et ainsi de fausser le sujet. Fausser le sujet, en détournant les spectateurs et les aficionados vers un attachement à des traditions régionales, mises en avant comme étant les seules garantes de la pérennité taurine. Alors que l’on sait que la tauromachie perdurera par un seul et unique chemin, celui de perpétuer le toro bravo, mais là, les militants pour l’Intégrité totale et sans concessions de la corrida de toros, se retrouvent bien peu nombreux.

* Voir à ce sujet l’excellent article de Xavier Klein à la page http://bregaorthez.blogspot.com/search/label/UNIFORME