La corrida est rituélique et symbolique, même si cela doit déplaire à celles et ceux qui ne l’aiment pas, mais aussi à des aficionados qui acceptent difficilement qu’une telle approche soit exercée et notamment par des aficionados lambdas. N’étant pas un penseur, n’ayant fait aucune étude de philosophie, aborder de tels sujets risque de me condamner à la vindicte populaire et parfois populiste des contempteurs taurins et des sociétés initiatiques, et de surcroît pourrait aussi me voir critiquer par quelques penseurs officialisés de ces deux mondes, pour qui seuls des personnalités reconnues souvent de par des positions sociétales ou universitaires, ont l’unique droit d’émettre des idées. Aussi, que ces personnes continuent à passer leurs chemins, et que celles qui n’attachent aucunes importances aux titres, veuillent bien rester sur ces colonnes et prendre du recul, quitter un temps l’espace sociétal rationnel de notre quotidien, et se laisser aller à réfléchir de manière symbolique loin des pensées toutes faites, afin d’être soi-même et non pas un sempiternel relais de la pensée des autres.
Comme je l’ai déjà soulevé, et m’efforce modestement de poursuivre l’idée, la tauromachie et les mouvements philosophiques comme la franc-maçonnerie, possèdent quelques points communs. Si il y en a bien un qui passe souvent inaperçu, c’est celui très symbolique je le concède, qui s’effectue entre la légende hiramique et le premier tercio où le castoreño est censé mettre en valeur la bravoure du toro.
La franc-maçonnerie est l’héritière d’une histoire qui a pour fondement essentiel, un architecte fils d’une veuve. Ce fils, Hiram Abiff architecte du Temple de Salomon, trouva la mort parce que des compagnons, forcément qualifiés par l’adjectif mauvais, conspirèrent contre lui afin qu’il leur permette l’accès au degré de la maîtrise. A l’inverse de la tauromachie, qui connut les deux grands matadors que furent Josélito et Juan Belmonte, les deux « J », la légende hiramique nous fait découvrir les trois « J », Jubela, Jubelo et Jubelum, qui fomentèrent contre l’architecte.
Avant l’acte taurin, une foule de gens, aficionados, acteurs taurins, regardent l’animal qui sera combattu, rêvent à triompher de lui. Un triomphe réel du torero, un triomphe allégorique de l’aficionado. Mais au final, nous retrouvons peu d’individus qui entourent le toro lors de son entrée dans le ruedo, tout comme des quinze compagnons initiaux qui voulurent s’en prendre à Hiram, seuls trois allèrent au bout de leur préméditation. Certes, à l’inverse du nombre de compagnons, le trois n’est pas directement présent dans le premier tercio de la corrida, puisqu’aux peons s’ajoutent le torero et un peu plus tard le piquero. Mais nous retrouvons ce nombre de par les acteurs placés derrières les burladeros, souvent remplissant trois des abris. Comme à l’intérieur du Temple de Salomon dont Hiram Abbif assurait la réalisation, les trois burladeros représentent les trois portes auxquelles étaient postés les protagonistes, les compagnons. La vision du toro se retrouvant seul en piste, nous montre qu’il cherche la sortie, comme Hiram cherchera la sortie du Temple devant les attaques des trois ouvriers.
Aussi, il nous est autorisé de voir dans cette représentation de la mort d’Hiram, une concordance avec le premier tercio de la corrida. Comme le premier des compagnons attendit le maître à une première porte, celle du sud, un peon appelle le toro d’un premier burladero. Par cette tentative de rapprochement de l’homme vers l’animal, nous pouvons voir ainsi la demande de dévoiler les mystères de la Nature. Un face à face dans lequel l’homme cherche à découvrir si il peut être plus fort que l’animal, si il peut triompher de lui et ainsi percer son mystère.
Le toro ne voulant pas se laisser approcher, s’enfuit et rencontre à un second repère un autre peon qui l’interpelle, comme Hiram retrouva à la porte ouest du Temple, le second compagnon, Jubelo. Les lances de capote effectués à gauche et à droite par les peons afin de fixer l’animal, peuvent être apparentés aux coups portés par les compagnons devant le refus du maître de leur donner le mot sacré. Des coups portés, afin d’obtenir la tranquillité physique pour lui extirper le mot. Après une fuite éperdue à l’intérieur du Temple, Hiram s’est trouvé à la porte nord et devant son ultime agresseur. Là aussi ne voulant pas donner le mot demandé, Hiram se vît frappé par Jubelum. Mais après avoir été portés sur les épaules droites et gauches, le coup fatal est porté en pleine tête. Afin de demander au maître le mot permettant d’accéder au troisième degré, les compagnons ont utilisés les outils de la Connaissance, à savoir ceux des bâtisseurs, la règle à vingt-quatre divisions, l’équerre et le maillet. En ce geste vertical ultime qui fût fatal à l’architecte, réalisé à l’aide du maillet, l’on peut y voir celui du castoreño qui actionne la puya de haut en bas grâce au palo. Le coup porté sur la tête du maître se voulait l’intimider afin qu’il donne le mot sacré, mais qui en fait à révéler l’aspect de bravoure d’Hiram qui ne céda pas devant les attaques, à l’image de la pique pour qui l’un des objectifs, est de mettre en valeur la bravoure éventuelle de l’animal.
Le drame a engendré de la part de certains des confrères de maître Hiram, un sentiment de vengeance qui prédominait sur celui de justice. Sentiment qui perdure de nos jours, et qui est, il faut l’avouer, un peu contradictoire avec l’idéal. Il n’est pas improbable que, dans l’inconscient, l’aficionado qui assiste à une corrida, vienne lui aussi, assister à une vengeance. Celle symbolique de l’Homme sur la force brute et autoritaire de la Nature. Pas de la Nature en sa totalité, car cette dernière est multiple. Mais la vengeance envers la face sombre de la Nature, celle qui fait souffrir l’humanité lorsqu’elle se met en colère, qui nous met face à la mort d’un proche. Une Nature figurée par le taureau qui, par ses qualités animales et ses comportements, se fait la représentation allégorique de tout ce qu’elle peut démontrer. Grâce à l’affrontement de l’être humain et du taureau, les individus font perdurer cette envie de triompher de plus fort qu’eux, de ce qui peut les faire souffrir dans le côté le plus sombre de la Vie.
Les trois personnages fautifs qui prirent la vie du maître, voulurent fuir, laissant les autres constructeurs sans la parole sacrée. C’est vers la recherche de cette dernière, que les héritiers de la légende hiramique, s’attachent à œuvrer tout au long de leur cheminement. Dans une vision tout aussi symbolique, l’on peut être en droit de penser que c’est en quelque sorte un « mot perdu » que recherchent les aficionados, ce mot qui permettra de trouver la clef de la porte accédant au pays éternel. Car au delà de la perception simpliste et extrêmement basique dont les adversaires de la tauromachie nous accusent, la mort du taureau représente pour l’aficionado une préparation symbolique et mentale à sa propre mort. La tauromachie ne l’occulte en aucun cas, par celle, inéluctable, de l’animal vaincu, elle en prend conscience par celle probable de l’homme.
Contrairement aux personnages de la légende, l’aficionado ne fuit pas ses responsabilités face à la mort, il les assume et les revendique, ce qui n’est pas sociétalement acceptable de nos jours. La tauromachie est l’un de ces outils existentiels qui permettent de comprendre que la mort est la seule chose dont l’on soit certain, et qu’elle ne peut rien contre la vie. A chaque taureau succède un nouveau bovidé, et qu’à chaque homme et femme succède une nouvelle femme et un nouvel homme. Mais à l’inverse de la mort qui ne peut rien face à la vie, la vie ne peut rien contre la mort. Voir et méditer sur cela, permet de regarder et de réfléchir à son propre présent et devenir.Cette confrontation récurrente et volontaire entre l’être humain et l’animal, est au cœur de la démarche initiatique de toute personne passionnée de tauromachie. L’aficionado, l’aficionada, ne le cache pas, ne se le cache pas. À l’image du drame qui se déroula il y a plus de 6000 ans, où devant l’impossibilité de fuir ses agresseurs, voyant les trois portes du temple fermées, maître Hiram ouvrit sa « Porte intérieure », le passionné et la passionnée de tauromachie ouvre aussi sa porte intérieure, grâce au combat entre le matador et le taureau.
Comme je l’ai déjà soulevé, et m’efforce modestement de poursuivre l’idée, la tauromachie et les mouvements philosophiques comme la franc-maçonnerie, possèdent quelques points communs. Si il y en a bien un qui passe souvent inaperçu, c’est celui très symbolique je le concède, qui s’effectue entre la légende hiramique et le premier tercio où le castoreño est censé mettre en valeur la bravoure du toro.
La franc-maçonnerie est l’héritière d’une histoire qui a pour fondement essentiel, un architecte fils d’une veuve. Ce fils, Hiram Abiff architecte du Temple de Salomon, trouva la mort parce que des compagnons, forcément qualifiés par l’adjectif mauvais, conspirèrent contre lui afin qu’il leur permette l’accès au degré de la maîtrise. A l’inverse de la tauromachie, qui connut les deux grands matadors que furent Josélito et Juan Belmonte, les deux « J », la légende hiramique nous fait découvrir les trois « J », Jubela, Jubelo et Jubelum, qui fomentèrent contre l’architecte.
Avant l’acte taurin, une foule de gens, aficionados, acteurs taurins, regardent l’animal qui sera combattu, rêvent à triompher de lui. Un triomphe réel du torero, un triomphe allégorique de l’aficionado. Mais au final, nous retrouvons peu d’individus qui entourent le toro lors de son entrée dans le ruedo, tout comme des quinze compagnons initiaux qui voulurent s’en prendre à Hiram, seuls trois allèrent au bout de leur préméditation. Certes, à l’inverse du nombre de compagnons, le trois n’est pas directement présent dans le premier tercio de la corrida, puisqu’aux peons s’ajoutent le torero et un peu plus tard le piquero. Mais nous retrouvons ce nombre de par les acteurs placés derrières les burladeros, souvent remplissant trois des abris. Comme à l’intérieur du Temple de Salomon dont Hiram Abbif assurait la réalisation, les trois burladeros représentent les trois portes auxquelles étaient postés les protagonistes, les compagnons. La vision du toro se retrouvant seul en piste, nous montre qu’il cherche la sortie, comme Hiram cherchera la sortie du Temple devant les attaques des trois ouvriers.
Aussi, il nous est autorisé de voir dans cette représentation de la mort d’Hiram, une concordance avec le premier tercio de la corrida. Comme le premier des compagnons attendit le maître à une première porte, celle du sud, un peon appelle le toro d’un premier burladero. Par cette tentative de rapprochement de l’homme vers l’animal, nous pouvons voir ainsi la demande de dévoiler les mystères de la Nature. Un face à face dans lequel l’homme cherche à découvrir si il peut être plus fort que l’animal, si il peut triompher de lui et ainsi percer son mystère.
Le toro ne voulant pas se laisser approcher, s’enfuit et rencontre à un second repère un autre peon qui l’interpelle, comme Hiram retrouva à la porte ouest du Temple, le second compagnon, Jubelo. Les lances de capote effectués à gauche et à droite par les peons afin de fixer l’animal, peuvent être apparentés aux coups portés par les compagnons devant le refus du maître de leur donner le mot sacré. Des coups portés, afin d’obtenir la tranquillité physique pour lui extirper le mot. Après une fuite éperdue à l’intérieur du Temple, Hiram s’est trouvé à la porte nord et devant son ultime agresseur. Là aussi ne voulant pas donner le mot demandé, Hiram se vît frappé par Jubelum. Mais après avoir été portés sur les épaules droites et gauches, le coup fatal est porté en pleine tête. Afin de demander au maître le mot permettant d’accéder au troisième degré, les compagnons ont utilisés les outils de la Connaissance, à savoir ceux des bâtisseurs, la règle à vingt-quatre divisions, l’équerre et le maillet. En ce geste vertical ultime qui fût fatal à l’architecte, réalisé à l’aide du maillet, l’on peut y voir celui du castoreño qui actionne la puya de haut en bas grâce au palo. Le coup porté sur la tête du maître se voulait l’intimider afin qu’il donne le mot sacré, mais qui en fait à révéler l’aspect de bravoure d’Hiram qui ne céda pas devant les attaques, à l’image de la pique pour qui l’un des objectifs, est de mettre en valeur la bravoure éventuelle de l’animal.
Le drame a engendré de la part de certains des confrères de maître Hiram, un sentiment de vengeance qui prédominait sur celui de justice. Sentiment qui perdure de nos jours, et qui est, il faut l’avouer, un peu contradictoire avec l’idéal. Il n’est pas improbable que, dans l’inconscient, l’aficionado qui assiste à une corrida, vienne lui aussi, assister à une vengeance. Celle symbolique de l’Homme sur la force brute et autoritaire de la Nature. Pas de la Nature en sa totalité, car cette dernière est multiple. Mais la vengeance envers la face sombre de la Nature, celle qui fait souffrir l’humanité lorsqu’elle se met en colère, qui nous met face à la mort d’un proche. Une Nature figurée par le taureau qui, par ses qualités animales et ses comportements, se fait la représentation allégorique de tout ce qu’elle peut démontrer. Grâce à l’affrontement de l’être humain et du taureau, les individus font perdurer cette envie de triompher de plus fort qu’eux, de ce qui peut les faire souffrir dans le côté le plus sombre de la Vie.
Les trois personnages fautifs qui prirent la vie du maître, voulurent fuir, laissant les autres constructeurs sans la parole sacrée. C’est vers la recherche de cette dernière, que les héritiers de la légende hiramique, s’attachent à œuvrer tout au long de leur cheminement. Dans une vision tout aussi symbolique, l’on peut être en droit de penser que c’est en quelque sorte un « mot perdu » que recherchent les aficionados, ce mot qui permettra de trouver la clef de la porte accédant au pays éternel. Car au delà de la perception simpliste et extrêmement basique dont les adversaires de la tauromachie nous accusent, la mort du taureau représente pour l’aficionado une préparation symbolique et mentale à sa propre mort. La tauromachie ne l’occulte en aucun cas, par celle, inéluctable, de l’animal vaincu, elle en prend conscience par celle probable de l’homme.
Contrairement aux personnages de la légende, l’aficionado ne fuit pas ses responsabilités face à la mort, il les assume et les revendique, ce qui n’est pas sociétalement acceptable de nos jours. La tauromachie est l’un de ces outils existentiels qui permettent de comprendre que la mort est la seule chose dont l’on soit certain, et qu’elle ne peut rien contre la vie. A chaque taureau succède un nouveau bovidé, et qu’à chaque homme et femme succède une nouvelle femme et un nouvel homme. Mais à l’inverse de la mort qui ne peut rien face à la vie, la vie ne peut rien contre la mort. Voir et méditer sur cela, permet de regarder et de réfléchir à son propre présent et devenir.Cette confrontation récurrente et volontaire entre l’être humain et l’animal, est au cœur de la démarche initiatique de toute personne passionnée de tauromachie. L’aficionado, l’aficionada, ne le cache pas, ne se le cache pas. À l’image du drame qui se déroula il y a plus de 6000 ans, où devant l’impossibilité de fuir ses agresseurs, voyant les trois portes du temple fermées, maître Hiram ouvrit sa « Porte intérieure », le passionné et la passionnée de tauromachie ouvre aussi sa porte intérieure, grâce au combat entre le matador et le taureau.
2 commentaires:
bonjour,
Je ne sais ni lire ni écrire mais…
J'ai fortement perçu se sentiment de nature indomptée lors des encierros de Pamplona. Cet orage animal remontant les rues de la ville jusqu'à la plaza, laisse parmi la population durant un court laps de temps une traînée perceptible de fraternité humaine. Les gens s'aiment quelques minutes et ceci n'a pas de prix. Je me rappelle d'un matin en particulier. J'avais assisté à l'encierro depuis la cote de santo domingo et lorsque le deuxième pétard explosa, j'entrepris de remonter le parcours suivi par l'encierro quelques secondes plus tôt. J'ai senti une humanité primitive et solidaire. Un fort sentiment d'appartenance à une communauté humaine unie. Arrivé à telefonica, le charme était rompu…
C'est lors de ces occasions que l'on s'aperçoit de la profondeur et de l'authenticité de la fête des toros et de la portée philosophique de celle-ci.
J'ai dit
Puntilla
.......je ne sais qu'épeller. Merci de ta contribution Puntilla, tu peux me joindre sur l'adresse courriel qui figure sur mon profil, de midi à minuit sans problème. et aux autres heures aussi.
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